Partie III
Instructions pratiques
1. Instruction sur le sacrifice de la Messe
2. Prières durant la sainte Messe
3. Prières après la sainte Messe
4. PRATIQUES POUR LA CONFESSION
[Nous restaurons ici le titre de la table des matières ; le texte a : Pratiques pour le Sacrement de Pénitence]
Nota : 1° Les personnes qui se confessent rarement et dont la vie nest pas absolument régulière liront avant de se confesser ce qui a été dit des fausses conversions et de labus du sacrement, p.121 (p. ) ; et les personnes du sexe qui se confessent souvent liront la page 120 et la suivante (), afin quelles se préservent des abus qui se commettent souvent dans la fréquentation des sacrements.
Nota : 2° On doit entrer dans les sentiments qui sont exposés dans cette pratique, non seulement quand on sapproche du tribunal de la pénitence, mais encore toutes les fois quaprès sêtre rappelé tous les péchés de sa vie passée, on les confesse à Dieu dans son particulier, on les déteste, et on les déplore au pied du Crucifix. On peut ensuite, pour réparer linjure et loutrage quils ont faits à la Majesté divine, lui offrir les mérites de Jésus-Christ et des Saints, comme on la dit dans la pratique pour suppléer au défaut de notre culte, p. 16.
Sentiments dhumilité et de componction que lon doit avoir en sapprochant du tribunal de la Pénitence
Mon Dieu ! je viens me jeter aux pieds de votre miséricorde pour obtenir le pardon de mes péchés. Ayez pitié de moi, Seigneur, jetez un regard de compassion sur une créature qui voudrait rentrer en grâce avec son Créateur quelle a offensé. Recevez encore une fois au nombre de vos ouailles cette brebis égarée, à qui vous avez inspiré le désir de rentrer dans le bercail. Admettez encore parmi vos enfants, ou du moins parmi vos serviteurs, ce fils ingrat qui a quitté le meilleur de tous les pères.
Motifs de Contrition
Oui, Seigneur, je retourne à vous comme lenfant prodigue, et je reconnais comme lui la grandeur et la multitude de mes égarements. Le nombre de mes iniquités surpasse celui des cheveux de ma tête, et je puis bien vous dire comme ce fils ingrat mais pénitent, " Mon Père, jai péché contre le Ciel et contre vous " ; je vous ai offensé, je vous ai désobéi, je vous ai méprisé, je vous ai outragé, je vous ai abandonné pour suivre la fureur de ma passion, jai transgressé votre loi, jai foulé aux pieds vos saints commandements, jai abusé de vos grâces et de vos bienfaits, je les ai tournés contre vous-même, jai résisté à votre divine volonté, je me suis révolté contre vous, jai renouvelé par mes crimes la Mort et la Passion de Jésus-Christ mon Sauveur, je lui ai insulté comme les Juifs, je lui ai craché au visage, je lai couronné dépines, je lai attaché à la Croix. Quel sujet de regret ! Ô mon âme, soyez remplie damertume ! Ô mon cur, soyez brisé de douleur ! Et vous, mes yeux, répandez des torrents de larmes à la vue de linjure et de loutrage que mes péchés ont faits à la Majesté divine !
Qualités de la Contrition
Mon Dieu, pénétrez-moi dun repentir sincère ! Mon Dieu, donnez-moi une Contrition véritable, qui ait toutes les qualités nécessaires pour me justifier à vos yeux. Donnez-moi une contrition intérieure, qui touche mon cur, qui le change et le convertisse. Donnez-moi une contrition universelle, qui sétende sur tous mes péchés sans en excepter aucun. Donnez-moi une contrition souveraine, qui me fasse haïr et fuir le péché plus que tous les maux du monde. Donnez-moi une contrition surnaturelle ; que votre grâce soit le seul principe de ma douleur, et que vous en soyez le principal motif ; que je déteste mes péchés par rapport à vous, pour lamour de vous, parce quils vous déplaisent et quils vous offensent. Donnez-moi une contrition efficace, qui me porte à éviter les occasions du péché, à faire pénitence, et à mener une vie nouvelle, fervente et chrétienne.
Détachement du péché et renoncement à ses passions
Oui, mon Dieu, aidé de votre grâce je quitte en ce moment tout péché mortel et véniel. Je renonce entièrement, sincèrement et absolument à toutes mes mauvaises habitudes, à toutes mes passions, à mon orgueil, à ma vanité, à mon amour propre, à mon avarice. Je renonce à limpureté, à toute liaison et familiarité avec les personnes dun sexe différent. Je renonce à mon envie, à mes jalousies, à ma colère, et à mes vivacités, à mon intempérance et à ma sensualité, à ma tiédeur et à mes négligences. Je renonce à tous mes vices, à tous mes défauts, à toutes mes imperfections. Je renonce au monde et à moi-même pour me donner et me consacrer à vous sans réserve, dans la disposition de tout faire et de tout souffrir pour vous. Mon Dieu, arrachez de mon cur tout ce quil y a de vicieux, de corrompu, et dhumain, et remplissez-le daffections saintes, surnaturelles et divines. Mon Dieu, ôtez de mon cur tout ce qui vous y déplaît, et mettez votre divin amour. Mon Dieu, créez en moi un cur nouveau, un cur pur, un cur dégagé de toute attache à la créature.
Sentiments de crainte, de confiance, et damour
Mon Dieu ! quand je considère attentivement le nombre et lénormité de mes péchés, que jai lieu de craindre la sévérité de votre justice ! Ah ! Seigneur, je tremble quand je pense à la rigueur de vos jugements, je frémis quand je me représente lenfer que jai si souvent mérité. Oui, mon Dieu, je lai mérité, et combien de fois ? Vous seul le savez, Seigneur : autant de fois que je suis tombé dans le péché mortel. Je me suis rendu digne de tous les châtiments de votre colère, et indigne de vos grâces ; mais je sais, ô mon Dieu, que vos miséricordes sont infinies envers les pécheurs qui se convertissent sincèrement. Ainsi jose encore malgré mon indignité espérer le pardon de mes fautes, et je vous le demande par les mérites de Jésus-Christ, que je vous présente comme lunique fondement de ma confiance. Mon Dieu, oserais-je encore vous présenter un cur tant de fois souillé par lamour profane des créatures ? Ô encore aspirer au bonheur de vous aimer ? Mon Dieu, je renonce à cet amour profane. Permettez-moi de vous aimer désormais uniquement, souverainement, et constamment. Ah ! que ne puis-je, par les ardeurs et les transports de mon amour, réparer mes sécheresses, mes tiédeurs, et mes langueurs dans votre saint service ! Le souvenir de mes crimes et de mes infidélités passées sera donc pour moi un motif nouveau, un motif puissant, un motif continuel de vous aimer. Oui, mon Dieu, plus je vous ai offensé, plus je vous ai oublié, plus je veux à présent mattacher à vous et vous servir avec une fidélité inviolable.
Immédiatement avant la Confession
Mon Dieu, faites-moi la grâce de faire une bonne confession. Donnez-moi les lumières nécessaires pour connaître mes péchés, et la sincérité pour les déclarer tous, sans excuse ou déguisement. Mon Dieu, ne permettez pas que je maveugle et que je me trompe en me les cachant à moi-même. Mon Dieu, ne permettez pas que la crainte me ferme la bouche et que la honte mempêche de les découvrir au Prêtre. Je suis résolu de les confesser tous sans en retenir aucun, quelque répugnance et quelque difficulté je puisse trouver à en faire laveu, et quelque humiliation il puisse men arriver. Jen exposerai lespèce, le nombre et les circonstances, en expliquant simplement, clairement, et sans détours quelles sortes de péchés jai commis, combien de fois jy suis tombé, et de quelle manière. Jen ferai connaître la laideur, la malice, la cause, la durée, et les effets, sans me justifier en rien, reconnaissant ma faute en tout. Mon Dieu, éclairez aussi mon Confesseur afin quil puisse me donner des avis salutaires, et me diriger sûrement dans la voie du salut ; et ne permettez pas quil maccorde labsolution si je ne suis pas suffisamment disposé à la recevoir.
Quand le Prêtre donne labsolution
Mon Dieu, ratifiez dans le Ciel la sentence que votre Ministre prononce en ma faveur sur la terre. Mon Dieu, pardonnez tous mes péchés, pardonnez tous ceux que je connais et que je ne connais pas, tous ceux que jai commis par moi-même et que jai fait commettre aux autres. Mon Dieu, lavez mon âme dans votre Sang, purifiez-la de toutes les taches quelle a contractées. Mon Dieu, appliquez-moi les mérites de votre Mort et de votre Passion. Mon Dieu, versez dans mon cur une seule goutte de ce Sang précieux que vous avez répandu sur la Croix pour effacer les péchés du monde. Mon Dieu, accordez-moi toutes les grâces que vous avez attachées à ce Sacrement. Mon Dieu, dites-moi, comme à la pécheresse de lÉvangile : " Vos péchés vous sont pardonnés ". Vierge sainte et tous les saints du Ciel, priez le Seigneur pour moi afin quil maccorde labsolution de tous mes péchés et la grâce de ne plus retomber.
Si la personne qui reçoit labsolution était coupable de péché mortel
Mon Dieu, je me soumets de tout mon cur au jugement de votre Ministre. Je reconnais que je suis indigne de labsolution. Disposez-moi à la recevoir dignement. Je vais travailler, avec le secours de votre grâce, à my préparer, en suivant les avis que lon vient de me donner, en prenant les moyens que lon vient de me prescrire. Oui, Seigneur, je veux faire tout ce que votre Ministre mordonne de votre part, quelque contraire quil soit à mes inclinations.
Sur le délai de labsolution
Nota : 1° Si le pénitent nest pas suffisamment instruit de sa religion et de ses devoirs, ou quil soit engagé dans quelque habitude de péché mortel ou dans une occasion prochaine, ou quil ne soit point disposé à se réconcilier avec son prochain et à réparer le tort quil lui a fait dans ses biens ou sa réputation, ou quil nait pas une vraie contrition ni une résolution sincère de quitter le péché et de se corriger, le Confesseur ne peut point lui donner labsolution ; et sil le faisait il trahirait son ministère. Ainsi, loin de le trouver mauvais et den murmurer, comme il arrive à quelques personnes mal instruites, il doit lui en savoir bon gré. Et au lieu de la solliciter, il doit être le premier à demander quon la lui refuse, puisque, si on la lui donnait dans ces mauvaises dispositions, cette absolution étant nulle et sacrilège, elle ne servirait quà le rendre plus coupable en ajoutant à ses autres crimes celui de la profanation des sacrements de pénitence et deucharistie. Car une confession sacrilège est ordinairement suivie dune indigne communion, puisque on ne voit presque personne qui reconnaisse le défaut de sa confession avant de sapprocher de la sainte table. Si le pénitent ne se sent pas encore assez bien préparé, ou sil a encore la conscience chargée de quelque péché quil nose déclarer, il doit en avertir le Confesseur et le prier de lui différer labsolution jusquà ce quil soit mieux disposé et quil ait confessé tous ses péchés.
Nota : 2° Comme un juge sage et prudent ne prononce sa sentence quavec connaissance de cause, le Confesseur, que Dieu a établi juge des consciences ne doit porter son jugement quavec prudence et connaissance. Il ne doit donner labsolution quaprès sêtre bien assuré des dispositions de son pénitent, de la sincérité de sa déclaration et de sa contrition. Sans cela il expose le sacrement dont il est le Ministre à la nullité et à la profanation, et la personne quil absout témérairement à sa perte et à sa damnation. On ne doit donc pas être surpris quun Confesseur demande du temps pour connaître et pour éprouver les dispositions de ceux qui sadressent à lui. La grandeur du ministère quil exerce, le salut des âmes, et sa propre conscience demandent quil prenne toutes sortes de sages précautions pour ne rien précipiter dans des choses aussi essentielles.
5. INSTRUCTION POUR LA COMMUNION
[Titre conforme à la table des matières. Le texte a : Instruction pour le sacrement dEucharistie]
LEUCHARISTIE est le plus grand de tous les sacrements. Les autres renferment et donnent la grâce ; mais celui-ci contient et communique lAuteur de la grâce, Dieu lui-même, Jésus-Christ en personne avec ses deux natures, divine et humaine. Et comme les trois Personne de la sainte Trinité sont inséparables, non seulement le Fils de Dieu est présent dans la sainte Eucharistie, mais le Père et le Saint-Esprit sy trouvent avec lui par concomitance. Quel respect, quelle vénération, quel hommage quelle adoration, et quelles dispositions nexige pas de nous un Sacrement si auguste, qui renferme tout ce que la religion a de plus sacré, le Corps et le Sang de Jésus-Christ et sa Divinité même ! Jésus-Christ a institué ce Sacrement pour se donner à nous comme la nourriture spirituelle de nos âmes. Il sest donné aux hommes en général en sunissant à la nature humaine par le mystère de lIncarnation ; et sa charité infinie le porte à se communiquer en particulier à chacun de nous par la Communion, qui renouvelle en quelque sorte le mystère de lIncarnation, comme la Messe représente et contient celui de la Rédemption. Dans lIncarnation le Fils de Dieu sest uni à notre nature, et dans la Communion il sunit à nos personnes. Jésus-Christ sabaisse même plus profondément en se donnant à nous, qui ne sommes que des créatures viles, méprisables, et pécheresses, quil ne sest anéanti quen sincarnant dans le sein de la sainte Vierge, qui était la plus pure et la plus parfaite de toutes les créatures.
Effets de lEucharistie
Les principaux effets du sacrement de leucharistie sont,
1° lunion avec Jésus-Christ, ainsi que le terme même de communion lexprime. Car communion signifie union avec Dieu, selon ces paroles du Sauveur : " Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi en lui " (Jn 6, 57) ;
2° une vie surnaturelle, qui est la vie de la grâce : " Celui qui me mange vivra pour moi " (Jn 6, 58). Cette vie surnaturelle consiste à vivre et à agir en Dieu et pour Dieu, faisant ses actions par le mouvement de la grâce et non par celui de la nature, de sorte quaprès une Communion nous puissions dire comme saint Paul, " Ce nest plus moi qui vit, mais cest Jésus-Christ qui vit en moi " (Ga 2, 20).
3° Leucharistie nourrit et fortifie notre âme en la faisant croître et augmenter dans la grâce, et en la soutenant dans cette vie surnaturelle.
4° Comme la nourriture corporelle communique ses qualités à ceux qui la prennent, Jésus-Christ se donnant à nous comme la nourriture de nos âmes les sanctifie en leur communiquant sa sainteté, ses vertus, et ses sentiments. Ainsi la Communion, si on y est bien disposé, nous change et nous transforme pour ainsi dire en Dieu, en nous communiquant les qualités divines de Jésus-Christ.
5° De là il sensuit que ce Sacrement donne une infinité de grâces, et des grâces de toute espèce. Cest là le privilège quil a sur les autres, qui ont chacun des effets bornés et qui leur sont propres. Le Baptême nous donne la grâce dadoption pour nous faire enfants de Dieu ; la Confirmation nous fortifie dans la foi ; la Pénitence remet les péchés commis après le baptême ; le Mariage sanctifie lunion des époux ; lOrdre donne le caractère aux Ministres de lÉglise et des grâces pour remplir dignement leur fonction ; lextrême-onction aide les malades à bien mourir. Ainsi chaque Sacrement a un effet particulier ; mais la vertu de lEucharistie est universelle ; elle sétend sur toute la vie pour la sanctifier et pour la diviniser.
6° Leucharistie opère même sur le corps en lui communiquant un germe dimmortalité pour la résurrection glorieuse. Car cest en vertu de la Communion que nous ressusciterons du tombeau, parce que la chair du Sauveur qui est déjà ressuscitée glorieuse et immortelle communique à la nôtre ces mêmes qualités. Cest pour cela que lÉglise en administrant le viatique aux moribonds leur adresse ces paroles : " Que le Corps de Notre-Seigneur... vous ressuscite au dernier jour ".
Mais tous ces avantages ne sont accordés quà ceux qui communient dignement, parce que les Sacrements nopèrent que selon la mesure des dispositions quon y apporte. Ainsi ceux qui apportent à la sainte Table beaucoup de dispositions y reçoivent beaucoup de grâces ; ceux qui nen apportent que médiocrement nen reçoivent que médiocrement ; ceux qui nen apportent point, ou qui en apportent de mauvaises, loin den recevoir aucune, se rendent coupables du plus énorme des sacrilèges.
Horreur dune Communion indigne
Un chrétien qui communie indignement se rend coupable du plus énorme des sacrilèges, parce que, plus la chose quon profane est sainte, plus le sacrilège est grand. Et comme il ny a rien de plus sacré que le Corps et le Sang de Jésus-Christ unis à sa Divinité, il ne peut y avoir de sacrilège plus horrible que celui par lequel ce Corps et ce sang adorables sont profanés. Or, une personne qui reçoit lEucharistie en état de péché mortel profane le Corps du Sauveur ; elle foule son Sang au pied ; elle trahit le Fils de Dieu par un perfide baiser, comme Judas ; elle le livre, non plus aux Juifs, comme ce traître, mais, ce qui est pire encore, au démon qui habite dans son cur ; elle le crucifie de nouveau. Quelle horreur ! Un pécheur qui sapproche de nos Autels pour recevoir son Dieu indignement mériterait quun feu vengeur sortît du sanctuaire pour le dévorer, comme Oza, ou que la terre sentrouvrît pour lengloutir, comme Coré, dAthan et Abiron.
Quels sont les effets dune communion sacrilège ?
Les suites dune Communion indigne sont terribles. Celui qui communie indignement, selon saint Paul, en même temps quil " se rend coupable de la profanation du Corps et du Sang de Jésus-Christ, boit et mange sa condamnation " (1 Co 11, 29).
1° Il est abandonné de Dieu et livré au démon qui sen empare en entrant dans son cur, comme il est arrivé à Judas : post buccellam introivit in eum Satanas (Jn 13, 29). Or, étant ainsi abandonné de Dieu et livré au démon et à soi-même, on est capable des plus grands crimes.
2° Il tombe dans laveuglement et lendurcissement spirituel : ideo inter vos dormiunt multi (1 Co 11, 30). Avant la Communion on avait encore quelques lumières, quelques bonnes pensées, quelquenvie de bien faire. Mais dès quon a pris sur soi de communier en mauvais état, tout cela est éteint ; la grâce nopère plus comme auparavant ; les remords de conscience se calment ; le cur sendurcit et il devient insensible à la parole de Dieu, et les vérités les plus terribles de la religion ne font plus dimpression.
Qui sont ceux qui se rendent coupables dune Communion sacrilège ?
Les Communions sacrilèges sont très fréquentes, comme on la déjà dit en parlant de labus des Sacrements. Et ce ne sont pas seulement les grands pécheurs qui sen rendent coupables, mais une infinité dautres qui passent pour des gens de bien aux yeux du monde :
1° ceux qui ont caché quelque péché mortel dans leur Confession ;
2° ceux qui sont dans des habitudes criminelles dont ils ne se corrigent point ou dans des occasions prochaines de péchés auxquels ils ne renoncent point. Quand même ils sen seraient confessés et quils auraient reçu labsolution, cela nempêche pas que leur Communion ne soit sacrilège.
3° tant de personnes qui mènent une vie mondaine, quoi quelle soit exempte de grands crimes en apparence, qui nont que peu ou point de religion, qui se conduisent selon les principes et les maximes du monde, qui craignent plus les hommes que Dieu, qui cherchent les biens de la terre avec plus dempressement que ceux du ciel, en un mot, des personnes qui ont essentiellement lesprit du monde. Voyez ce quon a dit sur ce sujet, page 111.
4° une infinité de chrétiens qui négligent habituellement de remplir les devoirs essentiels de la religion et de leur état, comme de faire instruire ou dinstruire leurs enfants et leurs domestiques, de faire du moins implicitement des actes de foi, despérance, de charité, de restituer le bien dautrui, de payer leurs dettes, de se réconcilier avec leurs ennemis, etc.
5° ceux qui ne se font point de scrupule de certains péchés qui passent pour légers aux yeux du monde et qui sont griefs devant Dieu, comme de médire, de prononcer des paroles déshonnêtes, de sarrêter volontairement à des mauvaises pensées, de se permettre certaines libertés criminelles avec les personnes dun sexe différent, de se croire tout permis dans létat du mariage, de faire gras le carême ou dautres jours dabstinence, ou de transgresser aisément la loi du jeûne. Car si on regarde ces péchés et une infinité dautres comme légers, par une ignorance crasse, suivant là-dessus les idées, les sentiments du monde, plutôt que les instructions des Pasteurs et la décision de lÉglise, comment peut-on les détester par une sincère contrition ? Et si on ne les regrette pas sincèrement, comment pourra-t-on en obtenir le pardon ?
6° les mauvais chrétiens qui, après avoir mal vécu toute lannée, veulent cependant communier à Pâques, pour éviter la honte et la confusion dêtre remarqués sils ne communient pas comme les autres, ce qui est un très grand abus, car lÉglise, en ordonnant la Communion pascale, ne prétend pas engager à un sacrilège quelle a en horreur. Au contraire, elle déclare quune telle Communion ne satisfait point à son précepte, et que ceux qui ne se trouvent pas suffisamment disposés à Pâques doivent séloigner de la sainte Table jusquà ce quils soient en état de sen approcher dignement ;
7° les jeunes gens dissipés qui se livrent à toutes sortes de divertissements, les mondains qui mènent une vie sensuelle ;
8° ceux qui ne sapprochent des sacrements que très rarement et par contrainte,sont en grand danger de les recevoir indignement, aussi bien que certaines personnes du sexe qui sen approchent souvent, mais sans préparation et sans respect, par coutume et par habitude, et pour se satisfaire plutôt que pour mourir à elles-mêmes ;
9° les personnes qui communient dans les vues criminelles, par hypocrisie, pour être vues et estimées du monde, par intérêt, pour sattirer les charités dun Pasteur ou les bonnes grâces dune Maîtresse pieuse, par bienséance pour faire comme les autres. Si cest par de semblables motifs quon est porté principalement à la Communion, et quon se propose ces vues dorgueil et dintérêt comme fin essentielle de sa Communion, elle est sacrilège ;
10° en un mot, tous ceux qui reçoivent lEucharistie en péché mortel, de quelque espèce quil puisse être, à moins quon ne lignorât invinciblement, car alors le péché, si on était dailleurs bien disposé, serait remis par la vertu du Sacrement. Du moins cest le sentiment de saint Thomas et de plusieurs Auteurs.
Quelles sont les dispositions quon doit apporter à la sainte Table
Tous les Sacrements exigent de la part de ceux qui les reçoivent une préparation convenable ? Mais lEucharistie, étant le plus grand de tous, il demande aussi plus de dispositions que les autres. Les principales sont la pureté de cur, la droiture dintention, et la ferveur.
1° La pureté de cur, parce que Dieu est saint et quil ne peut faire sa demeure dans une âme corrompue par le péché ni établir son règne dans un cur où la passion domine et où le démon a son empire. Pour avoir cette pureté de cur il faut,
a° nêtre coupable daucun péché mortel, parce que lEucharistie est la nourriture de lâme, et la nourriture suppose la vie. Or, la vie de lâme, cest la grâce, et sa mort, cest le péché qui lui ôte la grâce.
b° Il faudrait être exempt de laffection au péché véniel, cest-à-dire, avoir une résolution sincère de les éviter tous et de nen commettre aucun de propos délibéré ;
c° sappliquer à mortifier ses passions et ses affections naturelles, à se détacher du monde, et à se renoncer soi-même, car puisque Dieu donne tout à tous, il est bien juste que nous nous donnions à lui sans réserve, que nous lui consacrions toutes les affections de notre cur en renonçant à tout ce qui pourrait lui déplaire. - La première de ces dispositions, qui est dêtre sans péché mortel, est dune nécessité absolue ; les deux autres sont toujours très utiles et très convenables, et lÉglise les exige pour la Communion fréquente.
2° La pureté dintention consiste à se proposer pour fin de la Communion la gloire de Dieu et sa sanctification. Les vues quon doit avoir en communiant sont, 1/ dhonorer la mort et la passion du Sauveur ; 2/ de sen appliquer les mérites ; 3/ de sunir à lui, de lavoir et de le posséder dans son cur ; 4/ de ne plus vivre que pour lui ; 5/ enfin, de recevoir toutes les grâces et les effets du Sacrement.
3° La ferveur ou la dévotion : cette ferveur consiste, 1/ dans un désir ardent de recevoir Jésus-Christ qui est la nourriture de nos âmes, car une nourriture prise sans faim et avec dégoût ne profite pas comme quand elle est prise avec appétit. Il faut cependant que ce désir de la Communion soit réglé et soumis ; 2/ dans des sentiments de foi, dhumilité, de respect, de confiance et damour convenables à la réception de cet auguste Sacrement.
6. CE QUON DOIT FAIRE POUR SEXCITER À UNE VRAIE DÉVOTION AVANT DE COMMUNIER
Pour entrer dans les sentiments de dévotion que demande la dignité de cet auguste Sacrement, on doit sy préparer sérieusement, faisant tout dans cette vue, rapportant toutes ses actions à cette fin, pensant souvent à la grande action que lon va faire et soccupant des trois réflexions suivantes.
Première réflexion
.Qui est-ce que je vais recevoir ? Cest Jésus-Christ mon Sauveur, mon Maître, mon Roi, mon Juge et mon Dieu. Oui, le Roi des Rois, le Seigneur des Seigneurs, Rex regum, Dominus dominantium (Dt 10, 17). Le souverain arbitre de tout lunivers, le Créateur du ciel et de la terre va descendre du trône de sa gloire pour se donner à moi. Les trois adorables Personnes de la sainte Trinité vont venir habiter dans moi-même. Que ne dois-je donc pas faire pour me préparer à les recevoir ! Avec quel soin et quelle attention ne dois-je pas me disposer à une si sainte action, puisquil sagit de préparer une demeure, non à un homme, mais à un Dieu, non homini sed Deo !
Seconde réflexion
Qui suis-je, moi qui espère avoir le bonheur de recevoir mon Dieu ? Hélas ! je ne suis quune vile et méprisable créature, une poussière, un ver de terre, un pécheur. Quel prodige de bonté, quun Dieu sabaisse et sanéantisse jusquà venir en moi ! que le Créateur descende jusquà sa créature ! que le Saint des Saints se communique à un indigne pécheur ! que le Maître vienne loger chez son serviteur ! que le souverain Monarque de lunivers établisse sa demeure et son trône dans le cur dun pauvre mortel ! que le pain des Anges soit donné aux hommes qui sont sur la terre ! Quelle bonté encore une fois ! quelle charité ! quelle miséricorde de la part dun Dieu ! Quel retour de reconnaissance et damour nexige-t-elle pas de la mienne ? Que puis-je faire ? Que puis-je dire ? Que puis-je penser à la vue dun bienfait si inestimable ? Quid faciem tibi (Jb 7, 20) ?
Troisième réflexion
Jésus-Christ veut se donner à moi. Et pourquoi ? par pure bonté, pour être avec moi, pour me sanctifier, pour nourrir mon âme, pour la fortifier, pour la combler de ses grâces. Si malheur si par mes péchés, mes passions, ma tiédeur et mon indisposition je lempêchais de répandre ses faveurs et ses miséricordes sur moi ! Mon Dieu, ne le permettez pas ; ôtez de mon cur tous les obstacles que je pourrais mettre à leffet de votre grâce. Purifiez-le, préparez-le vous-même à vous recevoir dignement. Venez, Seigneur, mon âme languit et mon cur soupire après le bonheur de vous posséder. Veni, Domine, et noli tardare
[Thème du temps de lavent, Veni, Domine, et noli tardare figurait dans lalleluia du 4e dimanche de lavent avant les réformes de Vatican II].
Ces trois réflexions bien méditées suffisent pour nous remplir de tous les pieux sentiments quil convient dapporter à la sainte Table. Chacun doit abandonner son cur à ceux que la grâce lui inspire, et y demeurer tranquillement tant quil y sera touché, car il nest pas nécessaire de les produire explicitement tous à chaque Communion. On pourra aussi, pour les exciter, lire quelque chose du quatrième livre de lImitation, et réciter les actes du Catéchisme avant et après la Communion. Mais il est mieux de se tenir aux pieds de Jésus-Christ, lécoutant dans le silence, comme Madeleine, demeurant dans un profond recueillement, étant comme absorbé en Dieu, transformé en Jésus-Christ et tout embrasé de son amour, réunissant toutes les puissances de son âme et toutes les affections de son cur pour ladorer, pour laimer, pour se dévouer à lui sans réserve.
7. Après la Communion
8. Ce quon doit faire après la Communion pour demeurer uni à Dieu et persévérer dans la grâce
9. Saintes résolutions qui renferment en abrégé les principes et les règles dune vie chrétienne
10. Indulgences
11. De la dévotion envers les saintes âmes des enfants morts après le baptême
12. Prière pour honorer et invoquer les saints enfants morts dans linnocence baptismale
13. Vêpres du Dimanche
14. Oraisons des Dimanches de lannée