Partie III

Instructions pratiques

 

1. Instruction sur le sacrifice de la Messe

2. Prières durant la sainte Messe

3. Prières après la sainte Messe

 

4. PRATIQUES POUR LA CONFESSION

[Nous restaurons ici le titre de la table des matières ; le texte a : Pratiques pour le Sacrement de Pénitence]

Nota : 1° Les personnes qui se confessent rarement et dont la vie n’est pas absolument régulière liront avant de se confesser ce qui a été dit des fausses conversions et de l’abus du sacrement, p.121 (p. ) ; et les personnes du sexe qui se confessent souvent liront la page 120 et la suivante (), afin qu’elles se préservent des abus qui se commettent souvent dans la fréquentation des sacrements.

Nota : 2° On doit entrer dans les sentiments qui sont exposés dans cette pratique, non seulement quand on s’approche du tribunal de la pénitence, mais encore toutes les fois qu’après s’être rappelé tous les péchés de sa vie passée, on les confesse à Dieu dans son particulier, on les déteste, et on les déplore au pied du Crucifix. On peut ensuite, pour réparer l’injure et l’outrage qu’ils ont faits à la Majesté divine, lui offrir les mérites de Jésus-Christ et des Saints, comme on l’a dit dans la pratique pour suppléer au défaut de notre culte, p. 16.

 

Sentiments d’humilité et de componction que l’on doit avoir en s’approchant du tribunal de la Pénitence

Mon Dieu ! je viens me jeter aux pieds de votre miséricorde pour obtenir le pardon de mes péchés. Ayez pitié de moi, Seigneur, jetez un regard de compassion sur une créature qui voudrait rentrer en grâce avec son Créateur qu’elle a offensé. Recevez encore une fois au nombre de vos ouailles cette brebis égarée, à qui vous avez inspiré le désir de rentrer dans le bercail. Admettez encore parmi vos enfants, ou du moins parmi vos serviteurs, ce fils ingrat qui a quitté le meilleur de tous les pères.

 

Motifs de Contrition

Oui, Seigneur, je retourne à vous comme l’enfant prodigue, et je reconnais comme lui la grandeur et la multitude de mes égarements. Le nombre de mes iniquités surpasse celui des cheveux de ma tête, et je puis bien vous dire comme ce fils ingrat mais pénitent, " Mon Père, j’ai péché contre le Ciel et contre vous " ; je vous ai offensé, je vous ai désobéi, je vous ai méprisé, je vous ai outragé, je vous ai abandonné pour suivre la fureur de ma passion, j’ai transgressé votre loi, j’ai foulé aux pieds vos saints commandements, j’ai abusé de vos grâces et de vos bienfaits, je les ai tournés contre vous-même, j’ai résisté à votre divine volonté, je me suis révolté contre vous, j’ai renouvelé par mes crimes la Mort et la Passion de Jésus-Christ mon Sauveur, je lui ai insulté comme les Juifs, je lui ai craché au visage, je l’ai couronné d’épines, je l’ai attaché à la Croix. Quel sujet de regret ! Ô mon âme, soyez remplie d’amertume ! Ô mon cœur, soyez brisé de douleur ! Et vous, mes yeux, répandez des torrents de larmes à la vue de l’injure et de l’outrage que mes péchés ont faits à la Majesté divine !

 

Qualités de la Contrition

Mon Dieu, pénétrez-moi d’un repentir sincère ! Mon Dieu, donnez-moi une Contrition véritable, qui ait toutes les qualités nécessaires pour me justifier à vos yeux. Donnez-moi une contrition intérieure, qui touche mon cœur, qui le change et le convertisse. Donnez-moi une contrition universelle, qui s’étende sur tous mes péchés sans en excepter aucun. Donnez-moi une contrition souveraine, qui me fasse haïr et fuir le péché plus que tous les maux du monde. Donnez-moi une contrition surnaturelle ; que votre grâce soit le seul principe de ma douleur, et que vous en soyez le principal motif ; que je déteste mes péchés par rapport à vous, pour l’amour de vous, parce qu’ils vous déplaisent et qu’ils vous offensent. Donnez-moi une contrition efficace, qui me porte à éviter les occasions du péché, à faire pénitence, et à mener une vie nouvelle, fervente et chrétienne.

 

Détachement du péché et renoncement à ses passions

Oui, mon Dieu, aidé de votre grâce je quitte en ce moment tout péché mortel et véniel. Je renonce entièrement, sincèrement et absolument à toutes mes mauvaises habitudes, à toutes mes passions, à mon orgueil, à ma vanité, à mon amour propre, à mon avarice. Je renonce à l’impureté, à toute liaison et familiarité avec les personnes d’un sexe différent. Je renonce à mon envie, à mes jalousies, à ma colère, et à mes vivacités, à mon intempérance et à ma sensualité, à ma tiédeur et à mes négligences. Je renonce à tous mes vices, à tous mes défauts, à toutes mes imperfections. Je renonce au monde et à moi-même pour me donner et me consacrer à vous sans réserve, dans la disposition de tout faire et de tout souffrir pour vous. Mon Dieu, arrachez de mon cœur tout ce qu’il y a de vicieux, de corrompu, et d’humain, et remplissez-le d’affections saintes, surnaturelles et divines. Mon Dieu, ôtez de mon cœur tout ce qui vous y déplaît, et mettez votre divin amour. Mon Dieu, créez en moi un cœur nouveau, un cœur pur, un cœur dégagé de toute attache à la créature.

 

Sentiments de crainte, de confiance, et d’amour

Mon Dieu ! quand je considère attentivement le nombre et l’énormité de mes péchés, que j’ai lieu de craindre la sévérité de votre justice ! Ah ! Seigneur, je tremble quand je pense à la rigueur de vos jugements, je frémis quand je me représente l’enfer que j’ai si souvent mérité. Oui, mon Dieu, je l’ai mérité, et combien de fois ? Vous seul le savez, Seigneur : autant de fois que je suis tombé dans le péché mortel. Je me suis rendu digne de tous les châtiments de votre colère, et indigne de vos grâces ; mais je sais, ô mon Dieu, que vos miséricordes sont infinies envers les pécheurs qui se convertissent sincèrement. Ainsi j’ose encore malgré mon indignité espérer le pardon de mes fautes, et je vous le demande par les mérites de Jésus-Christ, que je vous présente comme l’unique fondement de ma confiance. Mon Dieu, oserais-je encore vous présenter un cœur tant de fois souillé par l’amour profane des créatures ? Ô encore aspirer au bonheur de vous aimer ? Mon Dieu, je renonce à cet amour profane. Permettez-moi de vous aimer désormais uniquement, souverainement, et constamment. Ah ! que ne puis-je, par les ardeurs et les transports de mon amour, réparer mes sécheresses, mes tiédeurs, et mes langueurs dans votre saint service ! Le souvenir de mes crimes et de mes infidélités passées sera donc pour moi un motif nouveau, un motif puissant, un motif continuel de vous aimer. Oui, mon Dieu, plus je vous ai offensé, plus je vous ai oublié, plus je veux à présent m’attacher à vous et vous servir avec une fidélité inviolable.

 

Immédiatement avant la Confession

Mon Dieu, faites-moi la grâce de faire une bonne confession. Donnez-moi les lumières nécessaires pour connaître mes péchés, et la sincérité pour les déclarer tous, sans excuse ou déguisement. Mon Dieu, ne permettez pas que je m’aveugle et que je me trompe en me les cachant à moi-même. Mon Dieu, ne permettez pas que la crainte me ferme la bouche et que la honte m’empêche de les découvrir au Prêtre. Je suis résolu de les confesser tous sans en retenir aucun, quelque répugnance et quelque difficulté je puisse trouver à en faire l’aveu, et quelque humiliation il puisse m’en arriver. J’en exposerai l’espèce, le nombre et les circonstances, en expliquant simplement, clairement, et sans détours quelles sortes de péchés j’ai commis, combien de fois j’y suis tombé, et de quelle manière. J’en ferai connaître la laideur, la malice, la cause, la durée, et les effets, sans me justifier en rien, reconnaissant ma faute en tout. Mon Dieu, éclairez aussi mon Confesseur afin qu’il puisse me donner des avis salutaires, et me diriger sûrement dans la voie du salut ; et ne permettez pas qu’il m’accorde l’absolution si je ne suis pas suffisamment disposé à la recevoir.

 

Quand le Prêtre donne l’absolution

Mon Dieu, ratifiez dans le Ciel la sentence que votre Ministre prononce en ma faveur sur la terre. Mon Dieu, pardonnez tous mes péchés, pardonnez tous ceux que je connais et que je ne connais pas, tous ceux que j’ai commis par moi-même et que j’ai fait commettre aux autres. Mon Dieu, lavez mon âme dans votre Sang, purifiez-la de toutes les taches qu’elle a contractées. Mon Dieu, appliquez-moi les mérites de votre Mort et de votre Passion. Mon Dieu, versez dans mon cœur une seule goutte de ce Sang précieux que vous avez répandu sur la Croix pour effacer les péchés du monde. Mon Dieu, accordez-moi toutes les grâces que vous avez attachées à ce Sacrement. Mon Dieu, dites-moi, comme à la pécheresse de l’Évangile : " Vos péchés vous sont pardonnés ". Vierge sainte et tous les saints du Ciel, priez le Seigneur pour moi afin qu’il m’accorde l’absolution de tous mes péchés et la grâce de ne plus retomber.

 

Si la personne qui reçoit l’absolution était coupable de péché mortel

Mon Dieu, je me soumets de tout mon cœur au jugement de votre Ministre. Je reconnais que je suis indigne de l’absolution. Disposez-moi à la recevoir dignement. Je vais travailler, avec le secours de votre grâce, à m’y préparer, en suivant les avis que l’on vient de me donner, en prenant les moyens que l’on vient de me prescrire. Oui, Seigneur, je veux faire tout ce que votre Ministre m’ordonne de votre part, quelque contraire qu’il soit à mes inclinations.

 

Sur le délai de l’absolution

Nota : 1° Si le pénitent n’est pas suffisamment instruit de sa religion et de ses devoirs, ou qu’il soit engagé dans quelque habitude de péché mortel ou dans une occasion prochaine, ou qu’il ne soit point disposé à se réconcilier avec son prochain et à réparer le tort qu’il lui a fait dans ses biens ou sa réputation, ou qu’il n’ait pas une vraie contrition ni une résolution sincère de quitter le péché et de se corriger, le Confesseur ne peut point lui donner l’absolution ; et s’il le faisait il trahirait son ministère. Ainsi, loin de le trouver mauvais et d’en murmurer, comme il arrive à quelques personnes mal instruites, il doit lui en savoir bon gré. Et au lieu de la solliciter, il doit être le premier à demander qu’on la lui refuse, puisque, si on la lui donnait dans ces mauvaises dispositions, cette absolution étant nulle et sacrilège, elle ne servirait qu’à le rendre plus coupable en ajoutant à ses autres crimes celui de la profanation des sacrements de pénitence et d’eucharistie. Car une confession sacrilège est ordinairement suivie d’une indigne communion, puisque on ne voit presque personne qui reconnaisse le défaut de sa confession avant de s’approcher de la sainte table. Si le pénitent ne se sent pas encore assez bien préparé, ou s’il a encore la conscience chargée de quelque péché qu’il n’ose déclarer, il doit en avertir le Confesseur et le prier de lui différer l’absolution jusqu’à ce qu’il soit mieux disposé et qu’il ait confessé tous ses péchés.

Nota : 2° Comme un juge sage et prudent ne prononce sa sentence qu’avec connaissance de cause, le Confesseur, que Dieu a établi juge des consciences ne doit porter son jugement qu’avec prudence et connaissance. Il ne doit donner l’absolution qu’après s’être bien assuré des dispositions de son pénitent, de la sincérité de sa déclaration et de sa contrition. Sans cela il expose le sacrement dont il est le Ministre à la nullité et à la profanation, et la personne qu’il absout témérairement à sa perte et à sa damnation. On ne doit donc pas être surpris qu’un Confesseur demande du temps pour connaître et pour éprouver les dispositions de ceux qui s’adressent à lui. La grandeur du ministère qu’il exerce, le salut des âmes, et sa propre conscience demandent qu’il prenne toutes sortes de sages précautions pour ne rien précipiter dans des choses aussi essentielles.

 

5. INSTRUCTION POUR LA COMMUNION

[Titre conforme à la table des matières. Le texte a : Instruction pour le sacrement d’Eucharistie]

L’EUCHARISTIE est le plus grand de tous les sacrements. Les autres renferment et donnent la grâce ; mais celui-ci contient et communique l’Auteur de la grâce, Dieu lui-même, Jésus-Christ en personne avec ses deux natures, divine et humaine. Et comme les trois Personne de la sainte Trinité sont inséparables, non seulement le Fils de Dieu est présent dans la sainte Eucharistie, mais le Père et le Saint-Esprit s’y trouvent avec lui par concomitance. Quel respect, quelle vénération, quel hommage quelle adoration, et quelles dispositions n’exige pas de nous un Sacrement si auguste, qui renferme tout ce que la religion a de plus sacré, le Corps et le Sang de Jésus-Christ et sa Divinité même ! Jésus-Christ a institué ce Sacrement pour se donner à nous comme la nourriture spirituelle de nos âmes. Il s’est donné aux hommes en général en s’unissant à la nature humaine par le mystère de l’Incarnation ; et sa charité infinie le porte à se communiquer en particulier à chacun de nous par la Communion, qui renouvelle en quelque sorte le mystère de l’Incarnation, comme la Messe représente et contient celui de la Rédemption. Dans l’Incarnation le Fils de Dieu s’est uni à notre nature, et dans la Communion il s’unit à nos personnes. Jésus-Christ s’abaisse même plus profondément en se donnant à nous, qui ne sommes que des créatures viles, méprisables, et pécheresses, qu’il ne s’est anéanti qu’en s’incarnant dans le sein de la sainte Vierge, qui était la plus pure et la plus parfaite de toutes les créatures.

 

Effets de l’Eucharistie

Les principaux effets du sacrement de l’eucharistie sont,

l’union avec Jésus-Christ, ainsi que le terme même de communion l’exprime. Car communion signifie union avec Dieu, selon ces paroles du Sauveur : " Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi en lui " (Jn 6, 57) ;

une vie surnaturelle, qui est la vie de la grâce : " Celui qui me mange vivra pour moi " (Jn 6, 58). Cette vie surnaturelle consiste à vivre et à agir en Dieu et pour Dieu, faisant ses actions par le mouvement de la grâce et non par celui de la nature, de sorte qu’après une Communion nous puissions dire comme saint Paul, " Ce n’est plus moi qui vit, mais c’est Jésus-Christ qui vit en moi " (Ga 2, 20).

3° L’eucharistie nourrit et fortifie notre âme en la faisant croître et augmenter dans la grâce, et en la soutenant dans cette vie surnaturelle.

4° Comme la nourriture corporelle communique ses qualités à ceux qui la prennent, Jésus-Christ se donnant à nous comme la nourriture de nos âmes les sanctifie en leur communiquant sa sainteté, ses vertus, et ses sentiments. Ainsi la Communion, si on y est bien disposé, nous change et nous transforme pour ainsi dire en Dieu, en nous communiquant les qualités divines de Jésus-Christ.

5° De là il s’ensuit que ce Sacrement donne une infinité de grâces, et des grâces de toute espèce. C’est là le privilège qu’il a sur les autres, qui ont chacun des effets bornés et qui leur sont propres. Le Baptême nous donne la grâce d’adoption pour nous faire enfants de Dieu ; la Confirmation nous fortifie dans la foi ; la Pénitence remet les péchés commis après le baptême ; le Mariage sanctifie l’union des époux ; l’Ordre donne le caractère aux Ministres de l’Église et des grâces pour remplir dignement leur fonction ; l’extrême-onction aide les malades à bien mourir. Ainsi chaque Sacrement a un effet particulier ; mais la vertu de l’Eucharistie est universelle ; elle s’étend sur toute la vie pour la sanctifier et pour la diviniser.

L’eucharistie opère même sur le corps en lui communiquant un germe d’immortalité pour la résurrection glorieuse. Car c’est en vertu de la Communion que nous ressusciterons du tombeau, parce que la chair du Sauveur qui est déjà ressuscitée glorieuse et immortelle communique à la nôtre ces mêmes qualités. C’est pour cela que l’Église en administrant le viatique aux moribonds leur adresse ces paroles : " Que le Corps de Notre-Seigneur... vous ressuscite au dernier jour ".

Mais tous ces avantages ne sont accordés qu’à ceux qui communient dignement, parce que les Sacrements n’opèrent que selon la mesure des dispositions qu’on y apporte. Ainsi ceux qui apportent à la sainte Table beaucoup de dispositions y reçoivent beaucoup de grâces ; ceux qui n’en apportent que médiocrement n’en reçoivent que médiocrement ; ceux qui n’en apportent point, ou qui en apportent de mauvaises, loin d’en recevoir aucune, se rendent coupables du plus énorme des sacrilèges.

 

Horreur d’une Communion indigne

Un chrétien qui communie indignement se rend coupable du plus énorme des sacrilèges, parce que, plus la chose qu’on profane est sainte, plus le sacrilège est grand. Et comme il n’y a rien de plus sacré que le Corps et le Sang de Jésus-Christ unis à sa Divinité, il ne peut y avoir de sacrilège plus horrible que celui par lequel ce Corps et ce sang adorables sont profanés. Or, une personne qui reçoit l’Eucharistie en état de péché mortel profane le Corps du Sauveur ; elle foule son Sang au pied ; elle trahit le Fils de Dieu par un perfide baiser, comme Judas ; elle le livre, non plus aux Juifs, comme ce traître, mais, ce qui est pire encore, au démon qui habite dans son cœur ; elle le crucifie de nouveau. Quelle horreur ! Un pécheur qui s’approche de nos Autels pour recevoir son Dieu indignement mériterait qu’un feu vengeur sortît du sanctuaire pour le dévorer, comme Oza, ou que la terre s’entrouvrît pour l’engloutir, comme Coré, d’Athan et Abiron.

 

Quels sont les effets d’une communion sacrilège ?

Les suites d’une Communion indigne sont terribles. Celui qui communie indignement, selon saint Paul, en même temps qu’il " se rend coupable de la profanation du Corps et du Sang de Jésus-Christ, boit et mange sa condamnation " (1 Co 11, 29).

1° Il est abandonné de Dieu et livré au démon qui s’en empare en entrant dans son cœur, comme il est arrivé à Judas : post buccellam introivit in eum Satanas (Jn 13, 29). Or, étant ainsi abandonné de Dieu et livré au démon et à soi-même, on est capable des plus grands crimes.

2° Il tombe dans l’aveuglement et l’endurcissement spirituel : ideo inter vos dormiunt multi (1 Co 11, 30). Avant la Communion on avait encore quelques lumières, quelques bonnes pensées, quelqu’envie de bien faire. Mais dès qu’on a pris sur soi de communier en mauvais état, tout cela est éteint ; la grâce n’opère plus comme auparavant ; les remords de conscience se calment ; le cœur s’endurcit et il devient insensible à la parole de Dieu, et les vérités les plus terribles de la religion ne font plus d’impression.

 

Qui sont ceux qui se rendent coupables d’une Communion sacrilège ?

Les Communions sacrilèges sont très fréquentes, comme on l’a déjà dit en parlant de l’abus des Sacrements. Et ce ne sont pas seulement les grands pécheurs qui s’en rendent coupables, mais une infinité d’autres qui passent pour des gens de bien aux yeux du monde :

1° ceux qui ont caché quelque péché mortel dans leur Confession ;

2° ceux qui sont dans des habitudes criminelles dont ils ne se corrigent point ou dans des occasions prochaines de péchés auxquels ils ne renoncent point. Quand même ils s’en seraient confessés et qu’ils auraient reçu l’absolution, cela n’empêche pas que leur Communion ne soit sacrilège.

3° tant de personnes qui mènent une vie mondaine, quoi qu’elle soit exempte de grands crimes en apparence, qui n’ont que peu ou point de religion, qui se conduisent selon les principes et les maximes du monde, qui craignent plus les hommes que Dieu, qui cherchent les biens de la terre avec plus d’empressement que ceux du ciel, en un mot, des personnes qui ont essentiellement l’esprit du monde. Voyez ce qu’on a dit sur ce sujet, page 111.

4° une infinité de chrétiens qui négligent habituellement de remplir les devoirs essentiels de la religion et de leur état, comme de faire instruire ou d’instruire leurs enfants et leurs domestiques, de faire du moins implicitement des actes de foi, d’espérance, de charité, de restituer le bien d’autrui, de payer leurs dettes, de se réconcilier avec leurs ennemis, etc.

5° ceux qui ne se font point de scrupule de certains péchés qui passent pour légers aux yeux du monde et qui sont griefs devant Dieu, comme de médire, de prononcer des paroles déshonnêtes, de s’arrêter volontairement à des mauvaises pensées, de se permettre certaines libertés criminelles avec les personnes d’un sexe différent, de se croire tout permis dans l’état du mariage, de faire gras le carême ou d’autres jours d’abstinence, ou de transgresser aisément la loi du jeûne. Car si on regarde ces péchés et une infinité d’autres comme légers, par une ignorance crasse, suivant là-dessus les idées, les sentiments du monde, plutôt que les instructions des Pasteurs et la décision de l’Église, comment peut-on les détester par une sincère contrition ? Et si on ne les regrette pas sincèrement, comment pourra-t-on en obtenir le pardon ?

6° les mauvais chrétiens qui, après avoir mal vécu toute l’année, veulent cependant communier à Pâques, pour éviter la honte et la confusion d’être remarqués s’ils ne communient pas comme les autres, ce qui est un très grand abus, car l’Église, en ordonnant la Communion pascale, ne prétend pas engager à un sacrilège qu’elle a en horreur. Au contraire, elle déclare qu’une telle Communion ne satisfait point à son précepte, et que ceux qui ne se trouvent pas suffisamment disposés à Pâques doivent s’éloigner de la sainte Table jusqu’à ce qu’ils soient en état de s’en approcher dignement ;

7° les jeunes gens dissipés qui se livrent à toutes sortes de divertissements, les mondains qui mènent une vie sensuelle ;

8° ceux qui ne s’approchent des sacrements que très rarement et par contrainte,sont en grand danger de les recevoir indignement, aussi bien que certaines personnes du sexe qui s’en approchent souvent, mais sans préparation et sans respect, par coutume et par habitude, et pour se satisfaire plutôt que pour mourir à elles-mêmes ;

9° les personnes qui communient dans les vues criminelles, par hypocrisie, pour être vues et estimées du monde, par intérêt, pour s’attirer les charités d’un Pasteur ou les bonnes grâces d’une Maîtresse pieuse, par bienséance pour faire comme les autres. Si c’est par de semblables motifs qu’on est porté principalement à la Communion, et qu’on se propose ces vues d’orgueil et d’intérêt comme fin essentielle de sa Communion, elle est sacrilège ;

10° en un mot, tous ceux qui reçoivent l’Eucharistie en péché mortel, de quelque espèce qu’il puisse être, à moins qu’on ne l’ignorât invinciblement, car alors le péché, si on était d’ailleurs bien disposé, serait remis par la vertu du Sacrement. Du moins c’est le sentiment de saint Thomas et de plusieurs Auteurs.

 

Quelles sont les dispositions qu’on doit apporter à la sainte Table 

Tous les Sacrements exigent de la part de ceux qui les reçoivent une préparation convenable ? Mais l’Eucharistie, étant le plus grand de tous, il demande aussi plus de dispositions que les autres. Les principales sont la pureté de cœur, la droiture d’intention, et la ferveur.

La pureté de cœur, parce que Dieu est saint et qu’il ne peut faire sa demeure dans une âme corrompue par le péché ni établir son règne dans un cœur où la passion domine et où le démon a son empire. Pour avoir cette pureté de cœur il faut,

a° n’être coupable d’aucun péché mortel, parce que l’Eucharistie est la nourriture de l’âme, et la nourriture suppose la vie. Or, la vie de l’âme, c’est la grâce, et sa mort, c’est le péché qui lui ôte la grâce.

b° Il faudrait être exempt de l’affection au péché véniel, c’est-à-dire, avoir une résolution sincère de les éviter tous et de n’en commettre aucun de propos délibéré ;

c° s’appliquer à mortifier ses passions et ses affections naturelles, à se détacher du monde, et à se renoncer soi-même, car puisque Dieu donne tout à tous, il est bien juste que nous nous donnions à lui sans réserve, que nous lui consacrions toutes les affections de notre cœur en renonçant à tout ce qui pourrait lui déplaire. - La première de ces dispositions, qui est d’être sans péché mortel, est d’une nécessité absolue ; les deux autres sont toujours très utiles et très convenables, et l’Église les exige pour la Communion fréquente.

La pureté d’intention consiste à se proposer pour fin de la Communion la gloire de Dieu et sa sanctification. Les vues qu’on doit avoir en communiant sont, 1/ d’honorer la mort et la passion du Sauveur ; 2/ de s’en appliquer les mérites ; 3/ de s’unir à lui, de l’avoir et de le posséder dans son cœur ; 4/ de ne plus vivre que pour lui ; 5/ enfin, de recevoir toutes les grâces et les effets du Sacrement.

La ferveur ou la dévotion : cette ferveur consiste, 1/ dans un désir ardent de recevoir Jésus-Christ qui est la nourriture de nos âmes, car une nourriture prise sans faim et avec dégoût ne profite pas comme quand elle est prise avec appétit. Il faut cependant que ce désir de la Communion soit réglé et soumis ; 2/ dans des sentiments de foi, d’humilité, de respect, de confiance et d’amour convenables à la réception de cet auguste Sacrement.

 

6. CE QU’ON DOIT FAIRE POUR S’EXCITER À UNE VRAIE DÉVOTION AVANT DE COMMUNIER

Pour entrer dans les sentiments de dévotion que demande la dignité de cet auguste Sacrement, on doit s’y préparer sérieusement, faisant tout dans cette vue, rapportant toutes ses actions à cette fin, pensant souvent à la grande action que l’on va faire et s’occupant des trois réflexions suivantes.

Première réflexion.

Qui est-ce que je vais recevoir ? C’est Jésus-Christ mon Sauveur, mon Maître, mon Roi, mon Juge et mon Dieu. Oui, le Roi des Rois, le Seigneur des Seigneurs, Rex regum, Dominus dominantium (Dt 10, 17). Le souverain arbitre de tout l’univers, le Créateur du ciel et de la terre va descendre du trône de sa gloire pour se donner à moi. Les trois adorables Personnes de la sainte Trinité vont venir habiter dans moi-même. Que ne dois-je donc pas faire pour me préparer à les recevoir ! Avec quel soin et quelle attention ne dois-je pas me disposer à une si sainte action, puisqu’il s’agit de préparer une demeure, non à un homme, mais à un Dieu, non homini sed Deo !

Seconde réflexion

Qui suis-je, moi qui espère avoir le bonheur de recevoir mon Dieu ? Hélas ! je ne suis qu’une vile et méprisable créature, une poussière, un ver de terre, un pécheur. Quel prodige de bonté, qu’un Dieu s’abaisse et s’anéantisse jusqu’à venir en moi ! que le Créateur descende jusqu’à sa créature ! que le Saint des Saints se communique à un indigne pécheur ! que le Maître vienne loger chez son serviteur ! que le souverain Monarque de l’univers établisse sa demeure et son trône dans le cœur d’un pauvre mortel ! que le pain des Anges soit donné aux hommes qui sont sur la terre ! Quelle bonté encore une fois ! quelle charité ! quelle miséricorde de la part d’un Dieu ! Quel retour de reconnaissance et d’amour n’exige-t-elle pas de la mienne ? Que puis-je faire ? Que puis-je dire ? Que puis-je penser à la vue d’un bienfait si inestimable ? Quid faciem tibi (Jb 7, 20) ?

Troisième réflexion

Jésus-Christ veut se donner à moi. Et pourquoi ? par pure bonté, pour être avec moi, pour me sanctifier, pour nourrir mon âme, pour la fortifier, pour la combler de ses grâces. Si malheur si par mes péchés, mes passions, ma tiédeur et mon indisposition je l’empêchais de répandre ses faveurs et ses miséricordes sur moi ! Mon Dieu, ne le permettez pas ; ôtez de mon cœur tous les obstacles que je pourrais mettre à l’effet de votre grâce. Purifiez-le, préparez-le vous-même à vous recevoir dignement. Venez, Seigneur, mon âme languit et mon cœur soupire après le bonheur de vous posséder. Veni, Domine, et noli tardare [Thème du temps de l’avent, Veni, Domine, et noli tardare figurait dans l’alleluia du 4e dimanche de l’avent avant les réformes de Vatican II].

Ces trois réflexions bien méditées suffisent pour nous remplir de tous les pieux sentiments qu’il convient d’apporter à la sainte Table. Chacun doit abandonner son cœur à ceux que la grâce lui inspire, et y demeurer tranquillement tant qu’il y sera touché, car il n’est pas nécessaire de les produire explicitement tous à chaque Communion. On pourra aussi, pour les exciter, lire quelque chose du quatrième livre de l’Imitation, et réciter les actes du Catéchisme avant et après la Communion. Mais il est mieux de se tenir aux pieds de Jésus-Christ, l’écoutant dans le silence, comme Madeleine, demeurant dans un profond recueillement, étant comme absorbé en Dieu, transformé en Jésus-Christ et tout embrasé de son amour, réunissant toutes les puissances de son âme et toutes les affections de son cœur pour l’adorer, pour l’aimer, pour se dévouer à lui sans réserve.

 

7. Après la Communion

8. Ce qu’on doit faire après la Communion pour demeurer uni à Dieu et persévérer dans la grâce

9. Saintes résolutions qui renferment en abrégé les principes et les règles d’une vie chrétienne

10. Indulgences

11. De la dévotion envers les saintes âmes des enfants morts après le baptême

12. Prière pour honorer et invoquer les saints enfants morts dans l’innocence baptismale

13. Vêpres du Dimanche

14. Oraisons des Dimanches de l’année

 

Tables du Recueil

 

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