PARTIE I

La Vie chrétienne

 

1. Acte de consécration qu’on doit faire dès l’enfance, et renouveler souvent pendant la vie

2. Sur les principaux mystères

3. Sur les perfections de Dieu

 

4. PRATIQUE POUR SUPPLÉER aux défauts de notre culte envers Dieu et à l’insuffisance de nos pénitences

Mon Dieu, je voudrais pouvoir vous aimer et vous honorer autant que vous méritez de l’être. Je voudrais pouvoir vous rendre tout le culte qui est dû à votre souveraine grandeur, et réparer les outrages qui ont été faits à votre Majesté suprême ; mais comme je n’ai rien à vous offrir qui soit digne de vous, et que tout ce que je puis faire pour expier mes péchés n’a point de proportion avec leur nombre et leur énormité, pour suppléer au défaut de mes hommages et à l’insuffisance de mes pénitences je vous offre Jésus-Christ, votre cher Fils ; je vous offre toute la gloire qu’il vous a procurée depuis le premier moment de sa Conception jusqu’à son Ascension. Je vous offre toutes les actions de sa vie, sa mort, et sa passion. Je vous offre toutes les Messes qui se sont dites sur la terre et qui se diront jusqu’à la fin du monde. Je vous offre la pureté et la sainteté de la Vierge Marie. Je vous offre toutes les louanges et les adorations des Anges, tout l’amour des Chérubins et des Séraphins. Je vous offre tout le zèle et les travaux des apôtres, toutes les souffrances des martyrs, la chasteté des vierges, la piété des confesseurs, les prières, les jeûnes et les pieux sentiments de tous les saints. Je vous offre toutes les bonnes œuvres qui ont été faites depuis le commencement du monde, et que l’on fera jusqu’à la fin des siècles ; je vous prie de m’en faire part. Je déteste et l’abhorre tous les crimes qui se sont commis et qui se commettront dans tout l’univers. J’unis mon intention à celle de Jésus-Christ et des saints ; je veux vous louer, vous aimer, vous glorifier, vous servir comme ils vous ont loué, aimé, servi et glorifié. Ainsi soit-il.

On peut se servir utilement de cette pratique dans les moments de sécheresse que l’on éprouve dans le temps de l’oraison et de la communion ; nous ne pouvons rien faire mieux alors que de nous humilier à la vue de notre néant, et d’offrir à Dieu les mérites de Jésus-Christ et la ferveur des saints pour suppléer au peu de dévotion que nous ressentons, réunissant tous leurs saints désirs, leurs pieuses affections et leurs grands sentiments pour les présenter à Dieu à la place de ceux que nous n’avons pas.

 

5. SUR LA GRÂCE

On n’est pas assez instruit sur la grâce ; on n’en connaît pas assez le prix et l’excellence, on n’en sent pas la nécessité. De là vient qu’on n’a pas d’ardeur pour la demander, et qu’on fait la plupart de ses actions sans grâce, par conséquent sans mérite.

La grâce est un don surnaturel qui nous est donné gratuitement par les mérites de Jésus-Christ pour nous aider à faire le bien, à éviter le mal, et à mériter la vie éternelle. La grâce est le plus excellent des dons de Dieu. Tous les talents de la nature et tous les biens du monde ne sont rien en comparaison. La moindre grâce vaut mieux que l’univers entier. On ne peut rien par rapport au salut sans la grâce, et on peut tout avec le secours de la grâce. Toutes les bonnes œuvres que l’on peut faire sont de nulle valeur si elles ne sont faites par le principe et le mouvement de la grâce. La grâce est admirable dans ses opérations et ses effets. Elle éclaire l’entendement ; elle anime la volonté ; elle touche le cœur, elle agit différemment dans les âmes. Elle est ordinairement obscure dans les commencements, lente dans ses progrès, et stable dans sa fin.

Les obstacles à la grâce sont surtout, 1/ la résistance à ses inspirations, 2/ le péché mortel, 3/ l’affection au péché véniel, 4/ les passions, 5/ les affections humaines, 6/ les joies vaines, les plaisirs et les divertissements, 7/ la dissipation, 8/ l’empressement, 9/ la négligence, 10/ les désirs et les pensées inutiles, 11/ l’esprit du monde.

Les moyens les plus ordinaires pour obtenir la grâce sont, 1/ de s’en reconnaître indigne, 2/ d’en avoir une haute estime, 3/ de la désirer avec ardeur, 4/ de la demander avec insistance par une prière fervente et continuelle, 5/ d’avoir beaucoup de reconnaissance pour celles que Dieu nous a accordées du passé, 6/ de faire un bon usage de celles qu’il nous fait pour le présent, 7/ de fréquenter les sacrements avec les dispositions nécessaires, 8/ d’entendre la Messe avec dévotion.

Humble nécessité de la grâce

Je reconnais, Seigneur, le besoin extrême et continuel que j’ai du secours de votre grâce ; je reconnais que je ne suis rien, que je ne puis rien dans l’ordre surnaturel sans cette grâce. Non, mon Dieu, sans votre grâce je ne puis ni éviter le mal, ni faire le bien, ni le vouloir. Sans votre grâce je ne puis faire aucune bonne œuvre, je ne puis prononcer une sainte parole, je ne puis former un bon désir, je ne puis ni vous aimer, ni vous plaire, ni vous servir ; je ne puis rien faire qui soit digne de vous, rien qui puisse mériter le ciel. Si je suis pécheur, je ne puis me convertir sans votre grâce. Si je suis juste, je ne puis persévérer dans la justice sans votre grâce. Je m’humilie et m’anéantis dans la vue de ma faiblesse, de ma misère et de mon impuissance ; je me plairai même dans cette vue de mon néant, puisque ma faiblesse et mon impuissance feront éclater davantage la force et l’efficacité de votre grâce ; je me réjouirai de voir que je ne puis rien sans votre grâce et que c’est à elle que je suis redevable de tout ce que je suis à vos yeux. Oui, mon Dieu, je rapporte de tout mon cœur à votre grâce l’honneur et la gloire du peu de bien que j’ai pu faire, comme à la première et la principale cause de mes mérites.

CONFIANCE en la grâce

Je ne puis rien de moi-même, Seigneur, il est vrai, mais ce qui me console c’est que je puis tout avec le secours de votre grâce. Oui, mon Dieu, éclairé, touché, animé de votre grâce, il n’est rien de si difficile que je ne puisse faire ; il n’y a point d’ennemis que je ne puisse vaincre, point de tentations que je ne puisse surmonter, point de travaux, point de peines que je ne puisse supporter. Je mettrai donc désormais toute ma confiance en votre grâce ; votre grâce seule sera désormais mon soutien, ma force et mon appui ; elle m’éclairera dans mes ténèbres ; elle me fortifiera dans mes faiblesses, elle me soutiendra dans mes tentations, elle me consolera dans mes peines et mes afflictions ; elle m’aidera en tout temps, en tout lieu, en toute occasion.

PRIÈRE pour demander la grâce

Seigneur, je ne vous demande pas les biens temporels de ce monde, mais les biens spirituels de votre grâce. Je renonce aux richesses, aux honneurs, aux plaisirs de la vie présente. Je ne désire et je ne demande qu’une seule chose, qui est la grâce en ce monde et la gloire en l’autre. Seigneur mon Dieu, qui m’avez créé à votre image, accordez-moi cette grâce qui m’est si nécessaire pour surmonter le penchant de la nature qui m’entraîne au péché et à la perdition, car je sens dans ma chair la loi du péché qui s’oppose à celle de mon esprit, qui me captive, et qui m’excite à obéir à la sensualité dans bien des choses, sans que je puisse résister à son attrait si votre grâce ne m’assiste en répandant ses ardeurs dans mon âme. Mon Dieu, j’ai besoin de votre grâce, et d’une grande grâce pour vaincre la nature qui est penchée vers le mal. Ô que votre grâce m’est nécessaire pour commencer le bien, pour le continuer et le finir ! Ô grâce céleste, sans laquelle il n’y a point de vrai mérite, et sans laquelle tous les dons de la nature doivent être comptés pour rien ! Ô bienheureuse grâce qui enrichissez les pauvres d’esprit, venez, descendez en moi, remplissez-moi de vos consolations, fortifiez mon âme de peur qu’elle ne tombe en défaillance. Je vous demande, Seigneur, avec instance, de trouver grâce devant vous, car votre grâce me suffit quand je n’obtiendrai rien de ce que la nature désire.

Oraison de l’Église

Seigneur, que votre grâce me prévienne et m’accompagne toujours, et qu’elle me prote continuellement à la pratique de toutes sortes de bonnes œuvres. Par Jésus-Christ Notre-Seigneur. Ainsi soit-il.

Différentes sortes de grâces

Il y a différentes sortes de grâces : la grâce habituelle et la grâce actuelle. La grâce habituelle, que l’on nomme aussi sanctifiante, est l’état de justice et de sainteté où l’âme se trouve aux yeux de Dieu lorsqu’elle est exempte de péché mortel. La grâce actuelle est celle qui nous est donnée pour chaque action. La grâce habituelle nous est donnée dans le baptême ; elle nous fait enfants de Dieu et nous donne droit à la vie éternelle ; cette grâce se perd par le péché mortel ; on la recouvre par le sacrement de pénitence et par la charité parfaite. On ne peut point la mériter si on ne l’a pas, mais on peut en mériter l’augmentation quand on la possède. La grâce actuelle est commune aux justes et aux pécheurs ; elle donne le mérite aux actions des justes et dispose les pécheurs à la réconciliation avec Dieu, sans qu’ils méritent pour cela le ciel, car tout ce qui est fait hors de l’état de la grâce habituelle est perdu pour la vie éternelle : il faut pour la mériter être dans la grâce habituelle et agir par le mouvement de la grâce actuelle. Il y a des grâces suffisantes, des grâces efficaces, des grâces extérieures, des grâces intérieures, des grâces qui nous sont données pour notre sanctification et des grâces qui nous sont données pour la sanctification des autres, des grâces de lumière, des grâces de force ; enfin il y a la grâce de la vocation, par laquelle Dieu appelle une âme à la vraie religion, la grâce de justification, par laquelle il la justifie en lui pardonnant ses péchés, et la grâce de la prédestination, par laquelle il la met au nombre de ses élus.

Prière pour demander toutes les grâces du salut

Mon Dieu, je vous remercie de toutes les grâces que vous m’avez faites et de toutes celles que vous avez accordées à toute votre Église. Je vous demande pardon de l’abus que j’en ai fait, et je me propose d’en faire désormais un meilleur usage. Mon Dieu, accordez-moi toutes les grâces du salut, et particulièrement celles que vous savez m’être plus nécessaires pour ma sanctification. Mon Dieu, donnez-moi des grâces fortes ; des grâces efficaces, des grâces victorieuses qui me touchent, qui me charment et me convertissent. Donnez-moi des grâces de force pour me faire éviter le mal et de n’en plus commettre à l’avenir, surtout de ne jamais tomber dans le péché mortel. Mon Dieu, je vous demande la grâce d’avoir une foi ferme, une espérance certaine, et une charité parfaite. Je vous demande la grâce de vous aimer tendrement, souverainement et constamment, la grâce de vous servir fidèlement, la grâce de connaître et de faire en tout votre sainte volonté, la grâce d’observer tous vos

commandements et ceux de l’Église, la grâce de remplir exactement tous les devoirs de mon état, la grâce de bien employer le temps, de faire un bon usage de mes bien, de ma santé et de mes talents, faisant tout servir à votre gloire et à ma sanctification. Je vous demande la grâce de supporter mes peines avec patience, je vous demande la grâce d’aimer mon prochain comme moi-même, de faire du bien à tout le monde, de ne faire du mal à personne, de pardonner à mes ennemis, de ne point parler mal des autres ni d’écouter la médisance. Je vous demande la grâce de pratiquer les conseils de l’Évangile, qui sont les plus propres à me perfectionner dans les voies du salut, la grâce de me renoncer moi-même, de mourir à moi-même, la grâce de connaître mes passions et de les mortifier en leur résistant et en pratiquant les vertus contraires. Je vous demande la grâce de faire toutes sortes de bonnes œuvres avec une intention droite et avec une affection pure. Je vous demande la grâce de bien vivre et de bien mourir. Que votre grâce, ô mon Dieu, détruise en moi tous les obstacles que je pourrais mettre à ses divines opérations, qu’elle surmonte tout, qu’elle triomphe de tout, qu’elle ôte de moi tout ce qui lui déplaît, qu’elle croisse et qu’elle augmente tous les jours, et que la passion et la nature diminuent. Toutes les grâces que je vous demande pour moi, mon Dieu, je vous les demande pour toute l’Église ; je vous les demande au nom et par les mérites de Jésus-Christ. Et comme mes prières ne sont pas dignes d’être exaucées, je prie la Sainte Vierge et tous les saints de les demander à Dieu pour moi et pour tout le monde, et plus particulièrement pour tous ceux pour qui je suis plus obligé de prier.

 

6. AVEC QUEL ZÈLE tous les fidèles doivent prier pour l’Église

C’est une chose bien déplorable que de voir le peu d’ardeur que la plupart des chrétiens ont pour le bien de l’Église, et ils sont indifférents pour les autres. Ils prient pour eux, pour leurs parents et pour leurs amis. Mais leur zèle ne s’étend pas plus loin. Il est vrai que tout le monde n’est pas destiné par état à travailler au salut des âmes par l’instruction, la prédication, et l’administration des sacrements. Ce sont là des fonctions réservées aux prêtres ; mais tous les fidèles doivent procurer le salut de leur prochain par leurs prières, et ce sont ces prières des âmes ferventes que saint Augustin appelle les gémissements de la colombe, qui s’élèvent jusqu’au ciel, qui pénètrent jusqu’au trône du Très-Haut, et qui attirent sur les travaux des pasteurs et sur toute l’Église des grâces et des bénédictions abondantes. Une personne intérieure et mortifiée est plus utile à l’Église dans son silence et sa solitude que cent autres par leurs empressements, et elle contribue plus à la conversion et au salut des âmes par ses prières et ses mortifications que les discours des plus éloquents prédicateurs. Nous devons aimer l’Église comme un enfant aime la plus tendre et la plus chère de toutes les mères, puisque c’est elle qui nous a enfantés à Jésus-Christ. Or, si nous l’aimons véritablement, nous prendrons part à tout ce qui la concerne, nous serons sensibles à toutes ses pertes et à tous ses gains, nous serons touchés de tous les maux qui l’affligent, et nous ressentiront une sainte joie de toutes les consolations qu’elle éprouve ; nous gémirons à la vue de tant d’ennemis qui l’attaquent au-dehors et de tant de mauvais catholiques qui la déchirent au-dedans, et nous nous consolerons avec elle, pensant à ces âmes fidèles que Dieu conserve encore dans son sein malgré la corruption du siècle. La communion des saints, c’est-à-dire l’union et la communication réciproque qui doit être parmi les fidèles, doit produire en nous ces sentiments. Nous devons nous affectionner à ce qui nous regarde les uns les autres, puisque nous sommes tous les membres d’un même corps. Cette étroite union dont la charité est l’âme, régnait surtout parmi les premiers chrétiens. Nous voyons dans les Actes des Apôtres quelle joie ils ressentirent en voyant la foi se répandre dans le monde et le nombre des disciples s’augmenter tous les jours par la prédication de l’évangile et par les prodiges qui s’opéraient par le ministère de ceux qui l’annonçaient. Cette joie toute spirituelle était la seule consolation qu’ils eussent dans cette vie, et leur plus grande douleur était de voir l’Église persécutée, ou plutôt d’apprendre que quelque scandale ou quelque désordre l’eût affligée. Voyez comme toute l’Église était en peine pour saint Pierre lorsqu’il était en prison, et avec quelle ferveur on priait pour sa délivrance. En effet, quand on a ces sentiments, quand on prend part à tout ce qui se passe dans l’Église par l’amour sincère qu’on lui porte, on ne cesse de prier jour et nuit pour elle, on ne se contente pas de prier pour ceux de sa connaissance, car ce zèle que l’on se sent pour eux n’est souvent dicté que par une affection toute humaine. Mais on prie pour tous les chrétiens qui sont répandus dans tout le monde, et particulièrement pour ceux qui ont le plus besoin de grâces et de prières. Notre zèle dans l’exécution doit se borner aux devoirs de notre état, ou du moins aux bonnes œuvres compatibles avec les devoirs de notre état. Mais il ne doit point avoir de bornes dans l’intention. Il doit s’étendre jusqu’aux extrémités de la terre. Un cœur charitable embrasse toute l’Église ; et comme il ne peut point secourir chaque fidèle par sa présence et son action, il tâche du moins de les aider par ses prières et son affection.

 

PRIÈRE pour toute l’Église

 

Jésus-Christ, Pasteur par excellence, gouvernez vous-même votre Église. Sanctifiez-la, perfectionnez-la, défendez-la, protégez-la. Donnez-lui de bons pasteurs, des pasteurs éclairés et zélés. Formez-les vous-même selon votre cœur, placez-les dans les postes et les lieux que votre Providence leur destine. Bénissez leurs travaux. Éloignez de ce sacré ministère les mercenaires qui voudraient y entrer par une mauvaise porte pour y tuer et égorger. Suppléez aux défaits de ces lâches ministres qui négligent le troupeau qui leur est confié. Prenez vous-même soin de vos brebis, cherchez vous-même celles qui sont perdues, relevez celles qui sont tombées, bandez les plaies de celles qui sont blessées, fortifiez les faibles, conservez les fortes, conduisez-les toutes dans les sentiers de la droiture et de la justice. Accordez, Seigneur, à tous les fidèles en général et en particulier toutes les grâces dont ils ont besoin pour vous servir et pour se sanctifier.

Accordez aux enfants qui naissent la grâce du baptême, à ceux qui l’ont reçu le bonheur de la conserver, et à ceux qui l’ont perdue celui de la recouvrer. Procurez à la jeunesse une sainte éducation, inspirez aux enfants qui commencent à avoir l’âge de raison la pensée et le désir de se consacrer à vous. Faites qu’ils croissent en sagesse à mesure qu’ils avancent en âge. Donnez-leur le don d’intelligence pour comprendre les instructions qu’on leur fait et celui de piété pour les mettre en pratique eT pour se disposer saintement à la communion, et celui de la persévérance pour en conserver le fruit. Préservez-les des désordres et des égarements où l’on tombe si ordinairement dans cet âge si critique. Éclairez ceux qui veulent choisir un état, faites-leur connaître leur vocation, faites qu’ils la suivent fidèlement et qu’ils en remplissent les devoirs.

Accordez à ceux qui demeurent dans le célibat le don d’une parfaite chasteté jointe à une ardente charité. Et donnez à ceux qui s’engagent dans le mariage toutes les grâces nécessaires pour s’y sanctifier, pour vivre en paix et en union, pour s’aimer d’un amour pur et chrétien, pour éviter les désordres et les dangers auxquels ils pourraient être exposés, et pour élever chrétiennement leurs enfants. Accordez à ceux qui renoncent au monde la grâce de s’en détacher de cœur et d’esprit, de se renoncer eux-mêmes, et de mener une vie parfaite, pratiquant avec exactitude et avec ferveur la règle de l’Ordre qu’ils ont embrassé. Soutenez ceux qui sont demeurés dans le siècle contre les scandales qui y règnent, préservez-les de la contagion, du mauvais exemple. Ne permettez pas que leur cœur s’attache à la terre ou que l’embarras des affaires les détourne du soin de leur salut. Accordez à tous les états des grâces pour remplir leurs obligations. Donnez aux supérieurs des grâces pour commander justement, aux inférieurs des grâces pour obéir humblement, aux ouvriers des grâces pour travailler chrétiennement. Accordez aux maîtres la grâce d’être doux envers leurs serviteurs, et aux serviteurs la grâce d’être fidèles envers leurs maîtres. Donnez aux riches un cœur charitable et libéral envers les pauvres, et aux pauvres la vertu de se plaire ou du moins de se résigner dans leur état de pauvreté. Accordez aux jeunes la conscience de résister à la violence de leur passion, et aux vieillards le courage et la force de supporter leurs infirmités et la grâce de se disposer à la mort. Accordez à ceux qui sont en santé la grâce d’en faire un bon usage, et aux malades celle de sanctifier leur maladie par la résignation. Donnez aux agonisants la grâce de souffrir avec patience les travaux de leur agonie et de résister avec fermeté aux derniers efforts des ennemis du salut. Accordez aux mourants une sainte mort et aux morts la vie éternelle. Aidez surtout les personnes qui sont affligées, tentées, troublées, inquiétées, persécutées, opprimées, infirmes, abandonnées, oubliées, méprisées, humiliées, captives. Fortifiez-les dans leurs tentations, secourez-les dans leurs nécessités, soyez leur protecteur, leur appui, leur soutien, leur défenseur.

Seigneur, accordez à ceux qui habitent dans les villes la grâce de profiter de tous les moyens de sanctification qu’ils y trouvent, et d’éviter les occasions de péchés qu’ils y rencontrent. Et procurez à ceux de la campagne, par les soins de votre charitable Providence, tous les secours dont ils ont besoin pour le corps et pour l’âme. Soyez vous-même leur médecin spirituel et corporel, éclairez-les, instruisez les par l’onction de votre grâce, aidez-les dans leurs travaux, faites qu’ils les sanctifient par la patience et par la droiture de leur intention, vous les offrant et les rapportant tous à votre plus grande gloire. Rendez-les plus intérieurs, détachez-les de la terre, et faites que la vue de tous les objets qui les environnent élèvent leur cœur vers le ciel. Accordez aux justes la persévérance et l’augmentation dans la grâce, et aux pécheurs une conversion sincère. Éclairez ceux qui sont dans l’aveuglement, détrompez eux qui sont dans l’illusion, touchez les endurcis, appelez les infidèles à la foi, et faites entrer les hérétiques et les schismatiques dans le sein de l’Église. Enfin, ôtez aux juifs le bandeau qui les aveugle, afin qu’ils reconnaissent et qu’ils adorent avec nous le Sauveur qu’ils ont crucifié.

[Note : On peut ajouter à tout cela une infinité d’autres choses, selon les circonstances où l’on se trouve et selon les connaissances particulières que l’on peut avoir des besoins de l’Église. Mais on a pensé que ce détail suffirait pour donner une idée de la manière dont on doit s’intéresser auprès de Dieu pour le salut de tout le monde. On doit non seulement prier pour demander toutes ces grâces. Mais on peut encore entendre la Messe, communier, et faire d’autres bonnes œuvres dans l’intention de les obtenir. On peut aussi dire le chapelet dans la même intention, à la vue du crucifix dont les plaies peuvent servir à nous rappeler tous les différents états de l’Église. Le commencement du chapelet sera pour honorer le chef de Jésus-Christ couronné d’épines, et pour recommander à Dieu le chef et tous les pasteurs de l’Eglise. Le premier dizain pour honorer la plaie du côté du Sauveur, et pour recommander à Dieu tout le corps mystique de l’Église, qui est l’épouse de Jésus-Christ, et qui a été formée du sang qui est sorti de son côté après sa mort, comme Ève avait été formée de la côte d’Adam pendant son sommeil. Le second dizain pour honorer la plaie de la main droite, et pour demander à Dieu la persévérance des justes, afin que ni le démon, ni le monde, ni la chair ne puissent les ravir d’entre ses mains. Le troisième pour honorer la plaie de la main gauche, et pour demander à Dieu la conversion des pécheurs, le priant de les délivrer des mains et de l’esclavage du démon. Le quatrième pour honorer la plaie du pied droit, et pour demander le soulagement et la délivrance des âmes du purgatoire, et des grâces toutes spéciales pour les personnes qui sont dans des peines, des afflictions, et des tentations. Enfin, le cinquième pour honorer la plaie du pied gauche, pour demander la conversion des infidèles, des hérétiques et des juifs. Ainsi la récitation du chapelet servira en même temps à deux fins : à honorer les plaies du Sauveur, et à prier pour tous les besoins de l’Église.]

 

7. De la conformité à la volonté de Dieu

8. Sur la Providence

9. De la vie intérieure

 

Tables du Recueil

 

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