IMITATION DE MARIE
CINQUIÈME DIZAIN
Nous allons honorer ce cinquième dizain pour honorer la Sainte Vierge qui enfante, allaite et nourrit Jésus-Christ.
Notre Père...
1° Considérez que saint Joseph sapercevant de la grossesse de Marie tomba dans une étrange perplexité. Dun côté il nosait soupçonner la chasteté de Marie, dont il était assuré. De lautre la loi défendait de retenir une femme dans de semblables circonstances. Mais Dieu le tira de cet embarras en lui envoyant un Ange qui lui dit : " Joseph, ne craignez pas de recevoir et de conserver Marie votre épouse ; ce qui est né en elle est louvrage du Saint-Esprit " (Mt 1, 20). Cette histoire est pleine dinstructions. 1° Elle nous apprend que saint Joseph a gardé la virginité avec la sainte Vierge. 2° Elle nous fait voir la profonde humilité de la sainte Vierge, qui aimait mieux laisser saint Joseph dans son incertitude et sa perplexité, et rester dans une humiliante situation, plutôt que de révéler le mystère qui venait de sopérer en elle. Ainsi la Mère de Dieu nous apprend par cet exemple à cacher sous la garde de lhumilité les secrets de Dieu et les grâces singulières quil nous fait, et les bonnes uvres extraordinaires que nous faisons. Et saint Joseph nous apprend avec quelle prudence, quelle précaution, il faut agir dans les doutes et les embarras sans rien précipiter et sans juger ni condamner le prochain sous des apparences douteuses.
Demandons ces grâces par lintercession de Marie et de Joseph, son fidèle époux, et offrons à Dieu lhumilité et le silence de Marie pour expier noter jactance. Offrons la retenue de saint Joseph en réparation de nos jugements et de nos démarches précipitées.
Je vous salue...
2° Considérez que la sainte Vierge et saint Joseph, pour obéir à lédit de lEmpereur, allèrent se faire inscrire dans la ville de Bethléem dont ils tiraient leur origine. Et le temps de sa grossesse étant expiré, elle accoucha à Bethléem. Et ce fut ainsi accompli la Prophétie qui annonçait que le Sauveur du monde serait de la tribu de Juda et de la race de David, et quil naîtrait à Bethléem doù David tirait son origine. Voilà comme la divine Providence sait tout faire concourir à ses desseins les événements, même qui nous parassent être leffet du hasard ; elle les dirige tous à ses fins. La sainte Vierge aurait dû accoucher à Nazareth, qui était le lieu de sa demeure ; mais comme les Prophètes avaient prédit que le Sauveur du monde naîtrait à Bethléem, la Providence sait ly conduire, et elle se sert pour cela de lédit dun Empereur païen. Admirons donc cette adorable Providence jusques dans les plus petits événements. Remercions-la de tous les soins quelle a pris de nous jusquici, et abandonnons-nous totalement à sa conduite pour lavenir. Étudions ses vues ; adorons ses dispositions ; offrons aussi à Dieu toutes les fatigues et les incommodités que la sainte Vierge a souffertes dans son voyage dans létat pénible de sa grossesse, pour les femmes enceintes, afin que Dieu leur fasse la grâce de supporter patiemment et d sanctifier toutes les peines qui sont attachées à cette douloureuse situation.
Je vous salue...
3° Considérez que par un trait de la divine Providence Dieu permit que Marie et Joseph, qui étaient pauvres, ne trouvant point de place dans les hôtelleries, fussent obligés de se réfugier dans une étable, afin que le Sauveur nous apprît en naissant ainsi à mépriser les richesses, les honneurs et les plaisirs, et à aimer la pauvreté, lhumilité et les souffrances. Comme il était lAgneau de Dieu qui devait être immolé pour nous, il a voulu naître parmi ces animaux qui servaient de victime aux sacrifices de lancienne Loi, comme devant lui-même être la victime dans la Loi nouvelle. Dans les événements fâcheux, lorsquil arrive des choses contraires à notre volonté, à nos désirs, imitons Marie et Joseph qui, étant méprisés et rebutés de leurs parents qui demeuraient ou qui étaient venus à Bethléem, souffrirent cette humiliation avec douceur, se logèrent dans une étable, parfaitement contents et soumis aux ordres de la divine Providence, au lieu de murmurer contre la dureté et la malice des hommes. Envisageons la sagesse de la conduite de Dieu qui tire un bien du mal et tourne tout au salut des Élus.
Offrons à Dieu la parfaite tranquillité de Marie et de Joseph en réparation des plaintes et des murmures qui nous sont échappés dans les accidents fâcheux qui nous sont arrivés.
Je vous salue...
4° Considérez que comme le rayon du soleil pénètre le verre sans lendommager, Jésus-Christ est né du sein de Marie sans donner aucune atteinte à sa pudeur. Il est sorti du sein de sa Mère comme il est sorti du tombeau dont lentrée était fermée, de sorte que cest un article de foi que Marie est demeurée Vierge après lenfantement comme auparavant. Elle est toujours Vierge. Croyons cette vérité que lÉglise propose.
Félicitons Marie de ce quelle réunit en elle seule deux qualités incompatibles dans toutes les autres personnes de son sexe ; la virginité et la fécondité. Marie est Vierge et Mère tout à la fois. Cest un privilège qui lui convient uniquement, à lexclusion de toute autre.
Je vous salue...
5° Considérez quel transport de joie ce fut pour la sainte Vierge de voir le Sauveur du monde né de ses entrailles, avec quel respect elle se prosterna à ses pieds pour ladorer, avec quelle tendresse elle lembrassa, avec quelle effusion de cur elle le nourrit, avec quelle attention et quelle affection elle lenveloppa de langes et le mit dans une crèche. Prions la sainte Vierge de nous obtenir par son intercession une tendre dévotion envers lEnfant Jésus, et unissons-nous à elle pour ladorer et laimer. Dévouons-nous sans réserve à la Mère et au Fils. Imitons les vertus du saint Enfant Jésus, surtout son humilité, sa douceur, son innocence, son silence, sa docilité, son obéissance. Apprenons à nous regratisser
[Cest-à-dire, à nous rendre tout petits. Note de léditeur] comme lui, et demandons quil nous communique sa simplicité denfant.Offrons à Jésus la tendresse maternelle de Marie, et à Marie lamour filial de Jésus.
Je vous salue...
6° Considérez que la sainte Vierge, éclairée dune lumière divine, contemplait les grandeurs et les merveilles dun Dieu incarné, se rappelant et méditant dans le silence les paroles des Anges et des Bergers et les gravant dans son cur. Imitons ce miroir de justice. Gardons chaque jour quelques heures, ou du moins de temps en temps, le silence pour méditer les mystères et les vérités de notre sainte Religion. Gravons profondément dans notre cur les instructions et les lectures que nous avons entendues.
Demandons par lintercession de Marie des lumières vives et pénétrantes pour comprendre les vérités de notre Religion et la grâce den être touchés et de les mettre en pratique.
Je vous salue...
7° Considérez quelle joie la sainte Vierge ressentit quand elle entendit les Anges célébrer la naissance de son divin Enfant, et quand elle vit les Bergers et les Mages prosternés à ses pieds pour ladorer. Avec quel saint empressement ne leur présenta-t-elle pas ce cher Enfant, digne objet de leur culte, de leur vénération et de leur amour. Prions la sainte Vierge de nous donner son cher Fils Jésus pour être notre Roi, notre Sauveur, notre Rédempteur, notre vie, notre joie, notre consolation, nos richesses, notre trésor, notre partage, notre espérance, notre amour, notre lumière et notre force, en un mot, notre Dieu et notre tout dans ce monde, et notre récompense et notre félicité dans lautre.
Offrons aussi au saint Enfant Jésus la droiture et la simplicité, le saint empressement et lardeur des Bergers, la foi et la dévotion des Mages. Unissons-nous à eux pour adorer le saint Enfant Jésus, et nous consacrer à lui comme eux.
Je vous salue...
8° Considérez que la sainte Vierge, quarante jours après la naissance de Jésus, va le présenter au Temple et se soumet à la loi de la Purification, elle qui était sans tache et plus pure que les Cieux. Elle se mêle avec des femmes immondes et pécheresses, elle qui est la Mère de Dieu. Et nous qui ne sommes que corruption, nous voulons nous distinguer, nous élever au-dessus du commun. Semblables au Pharisien, nous nous flattons que nous ne sommes pas pécheurs comme le reste des hommes. Humilions-nous donc et mettons-nous, non seulement au rang des pécheurs, mais au-dessous des plus grands pécheurs.
Offrons lhumilité de Marie pour expier notre orgueil, et prions-la de nous obtenir par les mérites de sa Purification la grâce de nous purifier sans cesse de notre corruption. La sainte Vierge offrant comme les pauvres un couple de tourterelles nous apprend aussi à ne pas rougir de la pauvreté, à nous mettre volontiers au rang des pauvres, et aimons dêtre regardés et traités comme les pauvres.
Je vous salue...
9° Considérez que la sainte Vierge a présenté Jésus au Temple, et elle est en cela la figure de lÉglise qui offre tous les jours Jésus-Christ à Dieu dans le Sacrifice de la Messe. Depuis le commencement du monde on avait déjà offert à Dieu des victimes ; mais ce nétait que des figures imparfaites de cette Victime dun prix et dune dignité infinie que Marie offre aujourdhui à la majesté de Dieu, et qui peut seul lui rendre un culte et un hommage proportionné à sa souveraine grandeur. Offrons sans cesse Jésus-Christ à Dieu son Père à la sainte Messe, où il est réellement présent. Et à chaque instant nous pouvons loffrir mentalement. Cest lunique moyen que nous ayons de procurer à Dieu une gloire infinie, car toutes les créatures réunies et offertes à Dieu ne sont pas capables de lhonorer dignement, puisquelles sont toutes bornées et finies. Cependant, comme la sainte Vierge en offrant son Fils soffrait elle-même à Dieu avec son Fils, lÉglise en offrant Jésus-Christ dans le saint Sacrifice de la Messe soffre elle-même avec son Chef, et nous devons nous offrir aussi nous-mêmes sans réserve et sans partage, disposés à tout faire et à tout souffrir, à vivre et à mourir uniquement pour nus, à nous consumer comme une victime pour les intérêts de sa gloire.
Mettons-nous avec nos parents et nos amis entre les bras de la sainte Vierge, et prions-la de nous offrir à Dieu avec son Fils.
Je vous salue...
10° Considérez que lorsque Jésus fut présenté au Temple il arriva que deux saints personnages, Siméon et Anne, qui attendaient le Messie avec un saint empressement, vinrent dans le Temple par une inspiration du Saint-Esprit. Saint Siméon avait même eu une révélation expresse quil ne mourrait point avant davoir vu le Sauveur du monde. lEsprit de Dieu qui éclairait ces deux grandes âmes leur manifesta que lEnfant que Marie portait était le Sauveur quils attendaient. Siméon le prit entre ses bras, et rendant grâces à Dieu, il dit dans le transport de sa reconnaissance, " À présent je meurs volontiers puisque mes yeux ont vu le Rédempteur qui sera la gloire dIsraël et la lumière qui éclairera les Nations " (Lc 2, 29). Anna la Prophétesse publiait aussi à tous ceux qui étaient présents que ce saint Enfant était l"Envoyé de Dieu pour le salut du genre humain. Tout lunivers attendait le Messie, les juifs et les païens même. Mais ils avaient une intention et une disposition bien différentes. Les juifs charnels lattendaient pour en recevoir des prospérités temporelles, et les juifs spirituels lattendaient pour en recevoir des grâces surnaturelles, le pardon de leurs péchés, et le salut de leurs âmes. Jésus sest fait connaître aux bons et il sest caché aux méchants. Quand on cherche Dieu avec une intention droite, on le trouve, et quand on se recherche soi-même, on se trouve aussi soi-même pour sa perte et son malheur. Si saint Siméon fut si pénétré, fut si touché de reconnaissance pour avoir vu une fois le Sauveur du monde quil ne désirait plus rien sur la terre, quels doivent être nos sentiments de reconnaissance quand nous avons eu le bonheur de le recevoir dans la sainte Communion, non seulement entre nos bras, mais dans notre cur !
Offrons à Jésus et à Marie les pieux sentiments de Siméon et dAnne, et prions-les de nous obtenir une tendre dévotion envers le saint Enfant Jésus.
Je vous salue...
Offrande du Cinquième Dizain
Père Eternel, nous vous offrons le saint Enfant Jésus, né de la Vierge Marie, couché dans une crèche sur un peu de paille. Nous vous offrons ses adorations, ses vertus ; nous vous offrons ses larmes, ses pleurs. Laissez-vous attendrir en notre faveur par ses cris et par ses soupirs. Ô saint Enfant Jésus ! Nous vous louons, nous vous bénissons, nous vous adorons de tout notre cur, de toute notre âme, de toutes nos forces. Mais comme nos hommages sont très imparfaits, nous vous offrons tous les sentiments de respect, de tendresse, damour que votre sainte Mère a eus pour vous lorsquelle vous tenait entre ses bras, quelle vous nourrissait. Nous vous offrons la tendre compassion quelle ressentait quand elle voyait couler vos larmes et quelle entendait vos pleurs et vos gémissements. Ô sainte Mère de Dieu ! Nous vous rendons le culte et la vénération qui est due à votre Maternité divine. Mais comme nous navons rien à vous offrir qui soit digne de vous, nous vous offrons les sentiments damour, de tendresse, de bonté et de piété que votre saint Enfant Jésus avait pour vous.
Gloire au Père...