INSTRUCTION POUR LES HOMMES
Devoirs des hommes par rapport au mariage
On devrait se marier en chrétien, avec des vues pures, pour la gloire de Dieu, pour multiplier le nombre des fidèles et former des adorateurs de Dieu qui le servent avec piété dans ce monde et le bénissent éternellement dans lautre, pour se sanctifier soi-même avec son épouse, sédifiant mutuellement et sentraidant réciproquement dans tous les besoins du corps et de lâme. Voilà les intentions quon devrait se proposer en embrassant létat de mariage.
Mais point du tout ! On se marie en païen plutôt quen chrétien. On se marie par passion plutôt que par religion. Cest souvent le plaisir et lintérêt quon envisage plutôt que la gloire de Dieu et le salut de son âme. Au lieu de se préparer au sacrement de mariage par des intentions saintes, par des prières, par une bonne confession et une sainte communion, plusieurs cachent des péchés honteux quils ont commis avant le mariage, et eux-mêmes qui les déclarent nen ont souvent pas une véritable contrition. Ainsi ils profanent le sacrement si nécessaire pour se sanctifier dans un état si difficile et si dangereux. Ajoutez à cela les débauches, les ivrogneries, les intempérances, les danses, et les dissolutions auxquelles on se livre aux noces, les libertés criminelles quon y prend, les indécences honteuses quon se permet envers la mariée, indécences qui feraient rougir les païens, tant de paroles déshonnêtes quon y profère. Tout cela et mille autres désordres qui se commettent dans les festins ne sont propres quà attirer la malédiction de Dieu sur les mariages au lieu de la bénédiction quil y répandrait si on sy préparait convenablement et si on sy comportait décemment. Voilà la cause de tant de mauvais ménages et des suites fâcheuses des mariages célébrés en état de péché mortel, de la désunion entre les époux, et de la mauvaise éducation des enfants.
Or, un homme marié qui veut sincèrement se convertir doit gémir sur tous les égarements de sa jeunesse et sur les désordres de son mariage. Et quand il voit quil sest marié avec des intentions et des dispositions criminelles, il doit rétracter ses mauvaises intentions, et se proposer des vues plus chrétiennes. Il doit se proposer de demeurer dans létat du mariage et den remplir les devoirs en vue de Dieu et de son salut, den supporter les peines par un esprit de pénitence. Et après avoir détesté et confessé ses péchés, qui lont privé de la grâce du sacrement, il doit par de ferventes prières demander à Dieu quil lui rende ces grâces auxquelles il a mis obstacle par ses mauvaises dispositions. Il doit prier le Dieu de miséricorde quil lui accorde une nouvelle bénédiction à la place de la malédiction quil sétait dabord attirée par sa faute. Il serait bien à propos que les hommes mariés fissent un sérieux examen sur leur jeunesse, pour voir comment ils ont passé cet âge si critique, dans quels désordres ils sont tombés, sils ont confessé tous leurs péchés avec une vraie contrition. Ils doivent tâcher de réparer dans une bonne confession générale tous les défauts de leurs confessions précédentes.
Cest une erreur grossière que de simaginer que tout soit permis dans le mariage. On peut dire, au contraire, quune infinité de personnes se damnent dans le mariage en sy permettant des infamies et des abominations directement opposées à la sainteté quil exige, et malheureusement ces personnes mal instruites ou aveuglées par la passion qui les domine ne se confessent pas même des désordres quelles commettent. Voilà comme on se damne dans tous les états. Dans la jeunesse on se laisse entraîner dans le libertinage par de mauvaises compagnies ; dans le mariage on se permet des libertés infâmes quon cache au tribunal de la Pénitence.
Lusage du mariage est non seulement permis, mais saint, puisque Dieu la établi et que Jésus-Christ la sanctifié. Mais pour cela, pour quil soit saint et digne dêtre offert à Dieu comme une action méritoire, il faut que tout se passe décemment, quon se propose une bonne fin, telle que la propagation du genre humain, la multiplication des fidèles et des adorateurs du vrai Dieu, ou la justice en rendant à son époux, à son épouse, le devoir quon lui doit, ou la paix, lunion, la charité, pour se délivrer de la tentation et éviter de tomber dans quelque péché contraire à la sainte vertu de pureté, en éteignant dans lusage dun légitime mariage les feux de la concupiscence. Cependant, lacte du mariage, quoique bon en lui-même quand tout se passe comme il convient à des saints et à des chrétiens, et quon se propose une bonne fin, quon ne se permette que ce qui est permis et que ce quil faut pour le consommer, quon en use dans les temps et les circonstances convenables sans donner lieu de scandale à personne.
Cet acte devient criminel et péché mortel,
1° quand cest une passion criminelle qui en est le principe, quon y met toute son affection, son bonheur, sa félicité, quon préfère son plaisir à son Dieu et à son salut. Cest pourquoi lécriture nous apprend que les sept époux de Sara furent étouffés par le démon, en punition de la passion infâme qui les inspirait dans lusage du mariage.
2° Lacte du mariage est toujours péché mortel toutes les fois quon empêche la génération, ou quon nuit notablement au fruit déjà conçu. Ce premier péché est celui de Het et dOnan, que Dieu punit de mort, parce que, dit lécriture, ils faisaient une chose détestable, parce quils usaient du mariage dune manière contraire à la génération.
3° Quand on exige ou quon rend le devoir du mariage dune manière contraire à la nature et dans une situation notablement indécente, surtout quand elle empêche la conception.
4° Les attouchements qui se font en vue de lunion des époux, et qui se rapportent à la consommation du mariage, sont permis, mais ils sont criminels sils se font pour satisfaire une passion brutale, surtout sil sagit de fouiller lun ou lautre des époux. Voilà pourquoi lÉglise, en bénissant les époux, demande pour eux quils évitent les attouchements illicites ; cependant on ne regarde que comme péchés véniels ceux qui ne sont que momentanés et sans danger de souillure.
5° Les libertés honnêtes, les baisers, les familiarités décentes sont permises entre les gens mariés, pourvu quils se fassent avec bonne intention, comme pour entretenir la paix, lunion, lamitié, etc. ; mais des libertés infâmes sont des péchés abominables. Que chacun sexamine et interroge son pasteur et son confesseur pour savoir ce qui est permis et ce qui ne lest pas. Quil est à craindre de se laisser aveugler par la passion et de se faire une fausse conscience !
6° Ce nest pas la vue du plaisir charnel qui doit unir les époux ; ils doivent se proposer des motifs plus chrétiens. Cest toujours pécher que duser du mariage par le motif du plaisir sensuel. Cest péché mortel quand on y met sa fin dernière, et péché véniel quand on ny est pas si attaché quà sa fin, de sorte quon préfère toujours Dieu et son salut à cela et à toute autre chose, et quon soit prêt à tout quitter et à tout sacrifier plutôt que de commettre un péché mortel pour quelque plaisir et quelque intérêt que ce soit. Le sentiment de la concupiscence nest pas péché en soi-même, mais il est dangereux quon sy laisse trop aller et que la chair ne domine sur lesprit. Voilà pourquoi les grâces du sacrement sont si nécessaires aux époux pour vaincre les tentations de la concupiscence. Il est quelquefois plus aisé de sabstenir tout à fait du mariage que den user sobrement et chrétiennement. Les deux grands apôtres saint Pierre et saint Paul, éclairés et inspirés des lumières de lEsprit-Saint, ont pris grand soin dinstruire les fidèles des devoirs du mariage. Saint Pierre dit que les maris doivent habiter avec leurs épouses selon la science, cest-à-dire quils doivent savoir ce qui est permis et ce qui ne lest pas, ce qui convient et ce qui ne convient pas, quils doivent respecter le corps de leurs épouses - impartientes honorant (1 P 3, 7), - parce quelles participent à la même grâce et quelles sont destinées à la même gloire. En effet, le corps de la femme, aussi bien que celui du mari, est consacré par le saint-chrême dans le baptême, et encore plus par la sainte eucharistie. Le chef des apôtres a donc bien raison de dire quil faut le respecter. Malheur donc à ces maris brutaux, qui, sans avoir aucune considération pour le caractère du baptême et la dignité de chrétien dont leurs femmes sont honorées aussi bien queux, ne les envisagent que comme lobjet de leur sensualité et abusent de leurs corps pour satisfaire leurs désirs criminels et leurs détestables passions. Ce nest pas là respecter le corps de leurs femmes comme Dieu lordonne ; mais cest en abuser, cest le profaner, cest le déshonorer, cest se dégrader et savilir au-dessous des bêtes.
Saint Paul dit aussi que le mariage est honorable en tout, à tous égards. Il faut donc que les époux se comportent décemment et honorablement dans tous les devoirs du mariage. Il dit encore que chacun sache posséder le vase de son corps en honneur et en sainteté. Saint François de Sales dit que sainte Catherine de Sienne vit parmi les damnés plusieurs âmes extrêmement tourmentées pour avoir violé la sainteté du mariage, parce que, ne se faisant point de conscience des désordres quils y commettaient, ils y avaient longtemps persévéré. Le même saint dit encore que les époux doivent être modérés dans lusage du lit nuptial.
Enfin, lécriture nous apprend quil y a temps pour tout. Il y a un temps dabstinence destiné pour la pénitence, pour la prière, pour se préparer à la sainte communion, pour la sanctification des dimanches ; et lÉglise exhorte les époux à sabstenir du mariage au moins dans ces temps consacrés spécialement au culte de Dieu et à la pénitence. Cest aussi pourquoi saint Pierre recommande aux maris duser sobrement et prudemment du mariage, de telle sorte quil ne soit point un obstacle à la prière ni aux exercices de religion, ut non impediantur orationes vestras (1 P 3, 7).
Hors du temps destiné à lusage du mariage il ne faut ni sen occuper ni en parler, ni même y penser, mais se conduire comme des honnêtes gens qui ne pensent au boire et au manger que lorsquils se mettent à table, et après le repas se lavent les mains et la bouche pour navoir plus le goût ni lodeur de ce quils ont mangé. Cest une comparaison que saint François de Sales applique aux gens mariés, pour leur montrer avec quel détachement ils doivent user du mariage chrétien, selon ces paroles de lApôtre : " Que celui qui a une épouse soit comme nen ayant pas ! ". Saint François de Sales, dont la doctrine est approuvée par lÉglise, dit encore en parlant du lit nuptial : Que quoi que le commerce de lépoux soit de lui-même saint, juste, et utile à la République, il est néanmoins en certains cas dangereux à ceux qui le pratiquent. Car quelquefois il rend les âmes fort malades de péchés véniels, comme il arrive par les simples excès ; et quelquefois il les fait mourir par le péché mortel, comme il arrive lorsque lordre établi pour la production des enfants est violé et changé, auquel cas selon quon ségare plus ou moins de cet ordre les péchés sont plus ou moins exécrables, mais toujours mortels.
Devoirs
des maris envers leurs femmesLe premier devoir, cest de les aimer : " Maris, aimez vos femmes comme Jésus-Christ a aimé son Église ", disait saint Paul (Col 3, 19). Cest-à-dire quil ne suffit pas de les aimer dun amour naturel, mais quil faut les aimer dun amour surnaturel et divin, qui tende à leur sanctification, comme Jésus-Christ a aimé son Église jusquà verser son sang pour la laver, la purifier, et la sanctifier, lui faisant part de ses mérites, lui communiquant sa grâce et la gloire. Un mari chrétien ne doit rien avoir tant à cur que le bien spirituel de sa femme et de ses enfants. Il doit tout faire et tout sacrifier pour les faire marcher avec lui dans la voie du salut et les conduire au ciel, où ils seront réunis dans la félicité éternelle. Il y a des époux qui saiment dun amour passionné qui les porte à des excès criminels ; mais souvent cet amour se change en haine, et il a toujours de funestes effets. Il y a des époux qui saiment dun amour naturel, qui est permis en lui-même, mais qui nest daucun mérite à moins quil ne soit sanctifié par la grâce et la religion. Ainsi, le véritable amour qui doit unit les époux, cest un amour saint et naturel, qui vient de Dieu et que le Saint-Esprit inspire. Cet amour surnaturel est stable et constant, et il tend à la gloire de Dieu, à la sanctification des époux et à léducation des enfants.
Le second devoir essentiel des maris envers leurs femmes, cest la fidélité. Souvenez-vous de la promesse que vous avez faite aux pieds des autels et que vous avez confirmée par un serment solennel : Je vous jure et vous promets que je vous assisterai dans toutes vos nécessités. Gardez donc inviolablement votre promesse. Soyez fidèle mari. Vous vous êtes engagé et lié par les nuds sacrés du mariage, qui est indissoluble et qui doit durer jusquà la mort. Votre corps nest plus à vous ; il est à votre épouse ; ainsi vous nêtes plus le maître den disposer en faveur daucune autre sans vous rendre coupable de quatre péchés mortels. 1° Vous péchez contre la justice en manquant de fidélité à votre épouse. 2° Vous péchez contre la religion en violant votre serment et en vous rendant coupable de parjure. 3° Vous péchez contre la sainteté du sacrement que vous profanez. 4° Vous péchez enfin contra la pureté, que vous altérez.
Voilà pourquoi les péchés dimpuretés commis par des gens mariés sont beaucoup plus griefs que ceux qui se commettent hors du mariage. Cette multiplicité de péchés ne se rencontre pas seulement dans le crime infâme quon nomme adultère, mais encore dans toutes les autres fautes contraires à la chasteté, soit pensées, paroles, désirs, regards, libertés ou familiarités avec une personne du sexe. Aussi le Sauveur nous dit dans lévangile que celui qui regarde une femme avec des yeux de concupiscence a déjà commis ladultère dans son cur. Ainsi, chers époux, qui vous êtes engagés dans les liens du mariage avec lépouse que Dieu vous a donnée, ne pensez plus à dautres quà elle ; naimez quelle seule dun amour conjugal ; nayez dautre familiarité et ne prenez dautre liberté envers dautre, quelle quelle soit. Vous voulez que vos femmes vous soient fidèles : ne leur manquez pas les premiers de fidélité, car comment pouvez-vous exiger la chasteté de vos épouses si vous vivez dans limpureté ? Vous voulez quelles soient chastes et quelles naient aucune liaison avec dautres hommes : nen ayez donc point vous-mêmes avec dautres femmes.
La troisième obligation des maris envers leurs femmes, cest lassistance dans tous les besoins spirituels et corporels, selon cette promesse, " Je vous assisterai dans toutes vos nécessités ". Quand on se marie par intérêt ou passion lamitié ne dure quautant que lintérêt ou la passion trouvent des motifs qui lentretiennent. Mais à peine un époux et une épouse ont-ils perdu leur agrément, à peine sont-ils hors de lâge propre à contenter la passion que lon voit leur amitié prétendue dégénérer en indifférence, en dégoût, quelquefois même en haine ; et il y en a qui vont jusquà souhaiter la mort, au lieu que lorsquon sest marié en chrétien, lamour sincère, véritable, et surnaturel que la religion inspire se soutient toujours. Ainsi des époux chrétiens sont unis jusquà la mort ; ils partagent leurs consolations et leurs chagrins, leurs biens et leurs maux. Plus un époux est dans la peine, plus lautre prend soin de le soulager. Ni lâge le plus décrépi, ni les infirmités les plus dégoûtantes, ni les maladies les plus longues ne sauraient altérer son amitié ni sa charité. Voilà les effets des mariages chrétiens : lunion, la concorde, la paix, le support mutuel des défauts lun de lautre, lassistance et la consolation dans les adversités et la pauvreté, les avis charitables quon se donne réciproquement pour se porter au bien. Les maris doivent sans doute, comme chefs, corriger leurs femmes si elles tombent dans le désordre, mais ils doivent aussi écouter et recevoir avec reconnaissance les sages remontrances que leurs femmes leur donnent pour les retirer eux-mêmes du crime, des cabarets, des lieux de débauches, des mauvaises compagnies ou dautres dangers semblables.
Devoirs
des hommes envers leurs enfants et leurs domestiquesSaint Paul affirme en termes formels que celui qui na pas soin des siens, cest-à-dire de ses enfants, de ses proches, et de ses domestiques, cest-à-dire de tous ceux qui demeurent dans sa maison et que la Providence a soumis à ses soins et à sa direction, est pire quun infidèle et quil a renié la foi. Ainsi, un père de famille étant le chef, il doit gouverner toute la maison, femme, enfants, domestiques, ouvriers, journaliers ; il doit prendre soin du salut de tous, veiller sur tous, les empêcher de tomber dans le désordre, les porter au bien par ses paroles et encore plus par ses exemples. Il doit les instruire ou les faire instruire, les faire approcher des sacrements, leur faire observer les commandements de Dieu et de lÉglise, employer tous les moyens pour corriger leurs vices et les porter à la vertu, veillez à ce que les garçons et les filles naient aucune familiarité entre eux et ne tiennent aucun discours déshonnête. Si les enfants ou les domestiques se livrent à quelque excès, comme à livrognerie ou à limpureté, il doit les corriger et les punir. Sils fréquentent des lieux de débauche, des compagnies dangereuses, les danses, les cabarets, il doit aller les chercher, les retirer du précipice. Car si son animal, son buf ou son cheval tombait dans un fossé il irait sans doute le retirer du danger. Or la vie spirituelle de lâme de ses enfants ou de ses domestiques doit lui être plus chère que la vie corporelle de son animal.
Le chef de famille a reçu de Dieu lautorité pour gouverner toute sa maison. Aussi il rendra compte de tout ce qui sy passe, des désordres qui sy commettent, de tout le mal qui sy fait pas sa faute et de tout le bien qui ne sy fait pas par sa négligence. Un père chrétien et zélé fait régner la religion et la piété dans sa famille. Aussi voyons-nous que cet officier de lévangile, ayant cru en Jésus-Christ, engagea toute sa maison à croire en lui. Et Corneille, dont il est parlé dans les Actes des apôtres, avait tellement gagné à Dieu par son zèle et sa piété les gens qui le servaient et les soldats quil commandait que le Saint-Esprit descendit visiblement sur eux. Mais aussi, par une raison contraire, quun père sans religion ou un maître débauché fait du mal par ses discours impies et ses exemples scandaleux ! Il détruit dune main ce quun pasteur zélé édifie de lautre.
Il y a des gens si ennemis du bien quils contredisent les prêtres et empêchent leurs enfants et leurs domestiques de profiter des avis salutaires de leurs pasteurs et de leurs confesseurs. Pères et mères, soyez bien persuadés que vous ne pouvez rien laisser de plus précieux à vos enfants quune éducation chrétienne. Faites tout ce qui dépend de vous pour leur inspirer des sentiments de religion et dune piété sincère. Inspirez-leur un grand amour de Dieu et du prochain. Si vous avez des ennemis, loin de susciter dans vos enfants des sentiments de haine contre eux, apprenez-leur à les aimer. Inspirez-leur du mépris pour les biens de la terre et de lardeur pour les biens du ciel, de laffection pour la vertu et de lhorreur pour le péché. Ne laissez échapper en leur présence aucune parole qui puisse les scandaliser. Ne vous inquiétez pas beaucoup sils sont pauvres, pourvu quils soient pieux. Ne leur laissez pas le bien dautrui : ce serait pour eux un sujet de damnation. Si vous avez du bien mal acquis, retournez-le vous-mêmes plutôt que de charger vos héritiers dune restitution quils ne feront peut-être pas. En un mot, comportez-vous de telle sorte à légard de vos enfants que vous les meniez au ciel, pour bénir, louer, et aimer le Dieu Tout-Puissant, qui les a créés et les a confiés à vos soins comme des dépôts sacrés dont vous lui rendrez un compte exact et rigoureux, car sils viennent à se perdre, à se damner par votre faute, il y a tout à craindre quils ne vous entraînent avec eux dans lenfer, où ils vous maudiront à tout jamais.
Ceux qui sont échevins, maires, syndics, bangards
[gardes forestiers], gardes de cabarets, doivent remplir exactement les obligations de leurs charges, garder leur serment, concourir avec leur pasteur à empêcher tous les désordres qui se commettent dans les villages, et à faire régner partout lordre et la piété.
Défauts
ordinaires des hommesUn des défauts les plus communs aux hommes, cest la négligence du salut et lattache au temporel. " Que sert à lhomme ", dit Notre-Seigneur dans lévangile, " que sert à lhomme de gagner lunivers, sil vient à perdre son âme ? ". Il ny a quune chose nécessaire, qui est de servir Dieu et de faire son salut. Tout le reste nest rien en comparaison. Laffaire du salut est la première et la plus importante ou, pour mieux dire, lunique affaire. Elle devrait par conséquent marcher avant toutes les autres. Quel aveuglement de donner tous ses soins au corps et de négliger lâme, dêtre si occupé des affaires du monde, qui ne sont que des bagatelles, et de négliger la grande affaire du salut ! Quelle stupidité de travailler avec tant dassiduité pour la terre, et de ne pas faire un pas pour le ciel, de soccuper si fortement du temps et du temporel, et dêtre si indifférent pour le spirituel et léternité ! Quelle folie de tant craindre les maux passagers de cette vie, et dappréhender si peu les peines éternelles de lenfer ! Quel endurcissement de sattacher à la terre, et de ne pas désirer le ciel !
Voilà cependant comme sont la plupart des hommes qui vivent sur la terre ! Toutes leurs pensées, leurs désirs, leurs affections se portent vers les biens, les plaisirs, et les intérêts temporels, et ils sont dans la plus mortelle indifférence pour le salut éternel. Quand il sagit de quelque intérêt, de quelque argent, dun avantage terrestre, ils sont tout de feu. Mais sil sagit de la gloire de Dieu et du salut de leur âme, ils sont tout de glace. Point de goût pour la prière, pour la parole de Dieu, pour les bons livres, pour approcher des sacrements. A peine a-t-on commencé une prière quon voudrait lavoir finie. À peine est-on entré dans léglise quon voudrait en sortir. La prédication, loffice divin, et les exercices de piété sont toujours trop longs. Une heure passée à léglise leur paraît insupportable, tandis quils passeront un après-midi et quelquefois des nuits entières au cabaret. Les hommes ont une sorte dhorreur pour la confession et un dégoût mortel pour la communion, parce quils cherchent leurs consolations, non pas dans Dieu, mais dans les plaisirs sensuels, dans limpureté, dans livrognerie, dans le jeu, dans les compagnies des libertins. Voilà pourquoi ils nont plus que de lindifférence et de léloignement pour Dieu, pour les sacrements, et pour tous les exercices de religion. Ô enfants des hommes, sécriait David, jusques à quand serez-vous dans laveuglement pour naimer que la vanité ? Quittez tout, renoncez à tout, détachez-vous du monde, et vous trouverez tout en Dieu. Vous y trouverez votre consolation, votre bonheur, votre paix, votre félicité, car nous sommes créés pour Dieu, et nous ne serons jamais heureux quen le possédant. Tous ceux qui mettent leur fin dernière dans la créature et qui sy attachent comme à leur félicité sont dans létat de péché mortel, et incapables de recevoir dignement aucun sacrement. Ils sont dans un état de damnation, puisquils préfèrent la créature au Créateur, la terre au ciel, le temps à léternité, le corps à lâme, le temporel au spirituel, et un bonheur dun moment à un bonheur éternel.
Voilà cependant le malheur de bien des gens qui se livrent tout au monde et aux affaires du monde, et qui vivent dans une pitoyable négligence du salut. Il y en a un grand nombre qui renoncerait volontiers à la félicité éternelle pour jouir en ce monde dune félicité temporelle. Ces sortes de gens ont perdu la charité et même lespérance, qui consiste à se détacher des biens de la terre pour soupirer après ceux du ciel. Ainsi, mes frères, souvenez-vous des paroles de lApôtre : " Nayez plus goût pour les choses de la terre; que toute votre ardeur se porte vers les choses célestes ". Levez sept fois par jour les yeux au ciel et demandez que Dieu attire vers lui vos regards, vos pensées, vos affections, vos esprits, et vos curs, quil vous prépare une place parmi les élus, et quil vous fasse la grâce de la mériter par une vie sainte, fervente, et pleine de bonnes uvres. Détachez-vous du monde selon ces paroles de saint Paul : " Que ceux qui usent du monde soient comme nen usant pas, et que ceux qui achètent soient comme ne possédant rien ". Pourquoi ? " Cest ", dit le même apôtre, " que le temps est court, et que la figure de ce monde passe rapidement " (1 Co 7, 29-31).
Cest aussi ce maudit intérêt qui fait perdre aux hommes le fruit de leurs travaux, car la plupart des hommes ne travaillent que par intérêt et par passion, et non par religion. Ainsi leurs travaux, étant faits par des vues passionnées, deviennent criminels, et au lieu de mériter une récompense pour le ciel, ils méritent un châtiment dans lenfer. Au lieu dexpier leurs péchés en supportant avec patience les rigueurs et les incommodités du travail dans des vues de pénitence et de religion, ils augmentent le nombre de leurs crimes, parce quils ne travaillent que par orgueil, par ambition, par vanité, par ostentation, ou par sensualité, pour avoir de quoi contenter leurs passions.
Un second défaut ordinaire aux hommes, ce sont les injustices. Lavarice, qui est chez eux une passion dominante, les porte à toutes sortes de péchés, à des injustices, à des vols, à des rapines, à des procès, à des haines et des divisions, car le malheureux intérêt met la discorde dans les familles ; il divise le frère davec le frère ; il fait que les enfants en viennent à ce point dingratitude quils méconnaissent leurs parents mêmes. Il y a quelquefois des fils assez dénaturés pour désirer la mort de leur père afin de jouir de son héritage. De là cette joie secrète et maligne quils ressentent quand ils apprennent le décès dun proche qui leur laisse des biens. Quand on est possédé de cette cruelle passion davarice il ny a point de crime dont on ne soit capable. On met son bonheur et sa félicité dans les biens de ce monde ; on en fait son idole et son Dieu. Si on les perd ou si on ne peut les acquérir on est au désespoir. On les estime, on les désire avec une soif, une ardeur incroyable. On les quitte avec le plus vif regret. On est plus sensible à la perte dun procès, dun animal, ou dun peu dargent quà la perte de la grâce, du ciel, et de Dieu même. On veut acquérir et conserver les biens temporels à quelque prix que ce soit : on emploie pour cela les moyens les plus illicites, usure, fourberie, mensonge, parjure. Rien ne coûte ; les plus grands crimes ne font pas horreur quand il sagit des intérêts de la fortune ; on saveugle sur tout ; on se fait une conscience à sa mode pour prendre ou retenir le bien dautrui ; on empiète sur le terrain de son voisin ; on endommage ses héritages et ses meubles ; on gâte ses champs, on mange ses prairies, on dévaste ses moissons ; on retient le salaire des domestiques et des ouvriers ; on refuse de rendre les choses trouvées ; on suscite des querelles, on intente des procès.
Lorsquon a quelque affaire à démêler, on ne doit pas être juge de sa propre cause ; on doit prendre pour arbitre des personnes sages et éclairées, comme son pasteur, ou consulter des avocats. Enfin, si on est forcé de plaider, il faut plaider en ami, en chrétien, en bonne intelligence, ne demandant que la justice ; et comme on doit aimer son prochain comme soi-même, on doit être aussi content de voir que la partie adverse gagne son procès, dès quelle a droit, que si on le gagnait soi-même. Il ne faut jamais blâmer ni condamner les autres ; il faut être équitable, se mettre à leur place, écouter leurs raisons. Tenez pour certain quil vaut mieux quon ait votre bien que de ce que vous possédez celui des autres, car le bien dautrui sera comme un serpent qui dévorera votre héritage. Heureux ces hommes chrétiens qui ont une conscience droite, et les mains pures et exemptes de toute injustice ! Que ce nombre est rare ! Et combien de milliers dhommes se damnent tous les jours pour un vil et modique intérêt. Car il est certain, dit saint Paul, que les voleurs, les ravisseurs du bien dautrui, ni les avares qui sont plus attachés à largent quà Dieu, ne possèderont jamais le Royaume des cieux, à moins quils ne se détachent desprit et de cur des biens du monde, et quils ne restituent le bien dautrui.
Un troisième défaut des hommes, cest livrognerie et la fréquentation des cabarets. Ces lieux ont beau être défendus par les lois ecclésiastiques et civiles, les gens de la campagne ne cessent de les fréquenter, ou sans prétexte, ou sous des prétextes forgés et sans solidité, tant la passion est industrieuse pour se justifier et se conserver. On dit que cest pour faire des marchés, mais les lois cassent et annulent les marchés faits dans les cabarets. On dit que cest pour tenir compagnie à un ami. Mais quel ami ? Un ivrogne, un jureur, un impudique, un misérable qui veut vous rendre complice de sa crapule ! Vous appelez cela un ami. Et moi je lappelle un ennemi mortel, un homicide, puisquil veut donner la mort à votre âme, un voleur qui veut vous ravir le précieux trésor de la grâce et vous faire dépenser inutilement votre argent. Dailleurs, quelle que soit la compagnie qui vous y attire, est-elle préférable à celle de Notre-Seigneur, de sa sainte Mère, et des anges qui sont à léglise ? Ne vaut-il pas mieux choisir celle-ci ?
On se plaint de la misère des temps. On na point dargent pour payer ses dettes, pour faire dire une messe, pour nourrir sa femme et ses enfants, pour acheter du pain, et lon en trouve pour aller boire avec excès.
Quelle horreur quand un ivrogne plein de vin rentre dans sa maison ! Quel spectacle ! Quelle désolation pour une femme et des enfants ! Cest un démon, qui vient y apporter le trouble, le désordre, la discorde, et le désespoir. Cest un monstre capable de tout mal et incapable de faire aucun bien. Il ne vomit que des paroles impures, des jurements, et des blasphèmes. La fureur, les emportements, les gestes infâmes, les adultères, les batailles, les mutilations, les meurtres, et les homicides ne sont plus pour lui que des jeux. Rien nest plus mal et illicite à ses yeux que le bien lui-même. Le bon ordre de ses affaires, léducation de ses enfants, lédification du prochain, la sanctification des dimanches et des fêtes, lobservance du carême, ne sont plus pour lui des vertus et des devoirs. Il les enfreint sans le moindre scrupule, quelquefois même avec complaisance. Mais quelles sont les suites de tant dexcès ? Les morts subites et sans sacrements, limpénitence, et lendurcissement. Voilà où conduit livrognerie et la fréquentation des cabarets.
Les hommes qui ont quelque désir de faire leur salut doivent bien prendre garde de se laisser entraîner par les sollicitations et les mauvais exemples des autres. Ils doivent être bien persuadés quil faut marcher dans la voie étroite pour aller au ciel, et quen suivant la multitude on se damne avec elle. LÉglise permet bien aux ouvriers dont les travaux sont incompatibles avec le jeûne de prendre une nourriture suffisante pour les continuer, mais elle ne permet pas de boire du vin hors du repas par plaisir et par compagnie. Cependant on voit avec douleur des gens de toute condition boire et manger hors des repas, même au cabaret pendant le carême et les jours de jeûne, tant il est vrai quil y a bien peu de personnes qui aient une volonté sincère dobserver tous les commandements de Dieu et de lÉglise, et qui soient dignes dabsolution. Lécriture est remplie de ces menaces terribles contre les ivrognes : Malheur à vous qui buvez le vin avec sensualité ! Malheur à vous qui vous flattez de pouvoir boire beaucoup et de savoir porter le vin ! Le fiel des dragons et le venin des aspics : voilà le vin que Dieu dans sa colère prépare aux ivrognes dans lenfer. Ils présentent à Jésus-Christ du fiel et du vinaigre dans le temps de leurs débauches ; il est juste quils soient abreuvés de fiel et de poison pendant léternité.
Un quatrième défaut des hommes, cest la colère, les emportements, les jurements, et les imprécations dans leurs peines et dans leurs travaux.
Si Adam neût pas péché, lhomme aurait travaillé, mais ceût été un travail facile, doux et agréable, un travail de récréation, au lieu quaprès le péché Dieu a imposé à lhomme un travail pénible et difficile comme la juste peine de son péché : " Vous mangerez votre pain à la sueur de votre visage ". Ainsi dans les travaux les plus pénibles souvenez-vous de cette sentence que Dieu a portée contre vous ; dites-vous à vous-mêmes : Je suis pécheur, il est juste que je fasse pénitence, et mon travail accepté et souffert avec patience, résignation, et soumission à la volonté divine, doit être la matière de ma pénitence. Jésus-Christ mon Sauveur a été dans les travaux dès sa jeunesse ; il a mené une vie pauvre et laborieuse. Je veux donc honorer les travaux de Jésus-Christ par les miens ; je les unis aux siens ; je les offre à Dieu pour sa gloire, mon salut, et mes péchés. Ainsi, quand le travail sera difficile, le temps fâcheux et contraire, au lieu de jurer, de mimpatienter, je dirai avec David : " Je bénirai le Seigneur dans tous les temps et dans tous les lieux ". En sortant de ma maison et en entrant dans la campagne je penserai que toutes les créatures minvitent à bénir, à louer, et à aimer le Créateur. Le ciel qui me couvre, la terre qui me porte, lair que je respire, tout me portera à penser à Dieu, qui a tout créé pour mon usage. Quand je verrai des objets multipliés, je multiplierai les louanges du Seigneur et les actes de religion pour le glorifier, en disant, par exemple : " Que Dieu soit béni, loué, adoré, aimé, autant de fois quil y a détoiles au ciel, de grains de sable et de poussière sur la terre, autant de fois quil y a de gouttes deau dans la mer, les rivières, et les ruisseaux, autant de fois quil y a dherbes dans les prairies, de feuilles dans les forêts, de blés dans les moissons ", etc.
Cest une détestable coutume de beaucoup dhomme de proférer des paroles impures. Comme la bouche parle de labondance du cur ces obscénités montrent bien que le cur de ceux qui les débitent est corrompu par linfâme passion de limpudicité et quils sont lorgane du démon, qui veut par là infirmer dans ceux qui les entendent le poison dont leur âme est infectée. Ces malheureux sont le scandale et les corrupteurs de la jeunesse, à qui ils apprennent le mal quelle ignorait. Il y en a qui poussent linsolence jusquà manquer de respect à des filles et à des femmes, et à ne plus se prescrire de retenue envers le corps de ces pauvres innocentes rachetées du Sang de Jésus-Christ. Comme les ministres de Satan ils attentent à leur honneur par la voie de linsinuation, des promesses, et quelquefois même par la violence. Quelle horreur !
Des
hommes âgésLes vieillards doivent supporter patiemment les infirmités de la vieillesse pour expier les péchés de leur jeunesse. Ils doivent se détacher de tout, se préparer à la mort, se priver de tous les plaisirs du monde pour se punir de sêtre trop livrés aux plaisirs criminels. Ils peuvent souhaiter la mort, non pas par impatience, mais par le désir de voir Dieu dans le ciel, après lequel ils doivent toujours soupirer comme après leur patrie. Ils doivent aussi donner aux jeunes gens de bons exemples en les édifiant par leur prudence, leurs remontrances, leur gravité, et leur piété.
SAINTES RÉSOLUTIONS
que les hommes doivent prendre
pour se sanctifier dans leur état
Je veux désormais, avec le secours de la grâce, remplir tous les devoirs de mon état, user sobrement du mariage, et toujours dans de saintes vues et jamais par passion, avec lhonnêteté, la modestie, et la modération qui convient à des chrétiens, à des saints. Je veux aimer mon épouse dun amour surnaturel, respecter son corps, supporter ses faiblesses, soulager ses peines, pourvoir à ses besoins, procurer son salut, et vivre avec elle en paix et en union. Je lui conserverai une fidélité inviolable.
Je veux procurer à mes enfants et à mes domestiques une éducation chrétienne, les éloigner du vice, les empêcher daller aux danses et au cabaret. Je veillerai sur leur conduite. Je ne leur permettrai jamais de fréquenter les mauvaises compagnies, ni des personnes dun autre sexe, encore moins de courir la nuit, de donner du scandale. Je ne souffrirai jamais dans ma maison ni danses, ni jeux défendus, ni ivrognerie, ni familiarité entre des personnes dun sexe différent, ni paroles, ni chansons déshonnêtes, ni médisances.
Je veux remplir les devoirs de ma vocation en vue de Dieu. Je veux travailler, non pas par passion et par intérêt, mais par religion, dans un esprit de pénitence et résignation, me conformant en tout à la volonté de Dieu, dans tous les temps, les lieux, les événements de la vie, bénissant Dieu en tout et demandant que tout ce qui pourra marriver de bien ou de mal tourne toujours à sa gloire et à ma sanctification.
Je ne ferai jamais tort à personne ; je rendrai à chacun ce qui lui est dû ; jéviterai les haines, les disputes, les querelles, et les procès. Je ne me vengerai pas de mes ennemis ; je les traiterai avec charité, bonté, comme mes meilleurs amis. Je fuirai les cabarets comme des lieux pestiférés. Je ne boirai jamais par excès, ni hors des repas pendant le carême et les jours de jeûne, comme font les mauvais chrétiens qui transgressent les lois de lÉglise pour contenter leur sensualité et complaire à un ami de table et de plaisir qui les invite à boire.
Je ne profèrerai jamais aucune parole déshonnête ; jempêcherai même autant que je pourrai les mauvais discours et toutes sortes de péchés.
Je préfèrerai la gloire de Dieu et mon salut à tout. Je ne mettrai mon bonheur et ma félicité que dans Dieu ; et je ne regarderai toutes les choses du monde quen passant, et comme des moyens pour arriver à ma fin.
*
Je prie le Seigneur pour tous ceux qui liront cette exhortation, et demande pour eux la grâce den tirer toute lutilité possible pour le salut de leur âme. Cest le zèle et la charité que jai pour leur sanctification qui me la fait écrire. Je prie aussi la sainte Vierge, saint Joseph, sainte Anne et saint Joachim, vrais modèles des époux chrétiens, dintercéder pour toutes les personnes qui veulent embrasser létat du mariage ou qui y sont déjà engagées, afin quils leur obtiennent toutes les grâces nécessaires pour sy sanctifier et élever saintement leurs enfants.
Jexhorte aussi de tout mon cur les hommes de sapprocher souvent des sacrements, car cest léloignement quils ont pour la confession et la communion qui fait quils croupissent dans la tiédeur et la négligence du salut. Quils fassent donc de généreux efforts pour sortir dun état si misérable ; quils aillent se confesser tous les mois, et sils sont tombés dans quelque péché mortel, quils se relèvent promptement de leur chute en recourant sans délai au tribunal de la pénitence sans demeurer plus longtemps dans cet état de damnation. Enfin, au lieu de ce dégoût mortel quils ont pour la prière, pour la parole de Dieu, pour les offices divins, pour de saintes lectures, quils fassent maintenant leurs délices de tous ces saints exercices de piété. Quils passent au moins autant de temps à léglise aux pieds des autels quils en ont passé dans les cabarets, dans les jeux, les débauches, les intempérances, les impuretés, et dautres semblables désordres. Quils demeurent dans les églises, dans la compagnie de Jésus-Christ et des anges, autant de temps quils en ont perdu avec leurs compagnons de table et de débauches. Quils expient les jours de crime par des jours de pénitence, les jours dintempérance et de crapule par des jours de sobriété et de jeûne. Quils rachètent les jours de dissolutions et de dissipations par des jours de prière et de recueillement. Quils récupèrent les jours de tiédeur et de négligence par des jours de ferveur et par la pratique de toutes sortes de bonnes uvres ? Voilà ce que saint Paul appelle racheter le temps, et voilà ce que je vous souhaite, mes chers frères, et ce que je demande à Dieu pour vous au nom de Jésus-Christ, par lintercession de la sainte Vierge, des anges, et des saints, particulièrement de vos bons anges et de vos patrons. Ainsi soit-il.
Les hommes liront aussi avec fruit linstruction des garçons.
Avec Permission des Supérieurs