Relation
de ce qui mest arrivé en Chine pendant dix ans, sans compter deux ans pour y aller et à peu près autant pour revenir
par
le Vénérable Serviteur de Dieu Jean-Martin Moÿe.
Copie exacte de celle de Mr Raulin, faite à Portieux
en 1892.
Introduction de l'éditeur
À son arrivée à Chengdu, capitale de la province du Sichuan, le 28 mars 1773, Jean-Martin Moye séjourna plusieurs mois dans les environs pour se familiariser avec la langue de cette province. Il fut ensuite chargé par le vicaire apostolique, Mgr Francis Pottier (+1791), des chrétiens du Sichuan oriental, le long du Yangtsé, et de ceux, moins nombreux, de la province du Guizhou. Chungking était la plus grande ville de son territoire.
Durant son apostolat missionnaire Jean-Martin Moye prit lhabitude denvoyer à la Congrégation de la Propagande, qui dirigeait de haut les missions, un compte-rendu annuel de ses activités, quil écrivait en latin. Ces textes sont soigneusement préservés dans les archives de la Congrégation pour lÉvangélisation des Peuples. De temps en temps il envoyait aussi à la Société des missions étrangères de Paris un rapport en français, qui était dordinaire utilisé pour lédification des bienfaiteurs des missions.
Après dix ans passées dans la mission, Moye reçut de Mgr Pottier lautorisation de rentrer en France. Il quittait la Chine le 16 janvier 1784, à bord de la frégate La Méduse, qui était sous le commandement du capitaine Lunet du Miny. Il débarquait à Lorient le 29 mai suivant. Au cours de ce voyage à travers locéan indien et latlantique Moye occupa ses loisirs en composant un long mémoire sur son expérience en Chine. Conservé en plusieurs copies dans les Archives de Portieux, ce texte est révélateur de la conception quil faisait de la mission. Il décrit son apostolat, qui cherchait avant tout à équipper les croyants pour vivre et prier durant les longues périodes où ils étaient sans prêtre.
Consulté par tous les biographes de Jean-Martin Moye, ce texte na jamais été publié. Il est pourtant indispensable pour lhistoire des missions dans les trois provinces du Sichuan, du Guizhou et du Yunnan. Celle-ci était confiée à un missionnaire, Jean-François Gleyo (1734- 1786) qui avait été emprisonné sept ans, et devint ensuite un ami dévoué de Jean-Martin Moye. Ils visitèrent tous deux ensemble plusieurs villages chrétiens du Yunnan.
Le texte ici présenté est une copie de lexemplaire qui appartenait au chanoine Antoine Raulin (1738-1812), et que celui-ci avait dabord copié, sans doute sur le manuscrit, aujourdhui perdu, de Moye. Les mots chinois, y compris les noms des villes et des provinces, conservent lorthographe de loriginal. Les soustitres sont vraisemblablement de Raulin. La date qui est donnée en tête, 2 avril 1784, est celle où lauteur termina son travail. Au 6° de latitude nord et 22° de longitude (ouest), Jean-Martin Moye voguait alors dans latlantique sud, à hauteur de ce qui est maintenant le Sierra Leone.
G.T.
Relation de ce qui mest arrivé en Chine.