Courses.

 

Ayant commencé la visite d’une chrétienté si misérable, on vint me chercher pour une malade à trois journées de là ; je visitai encore en passant une chrétienté qui logeait dans un marché, endroit dangereux pour les chrétiens ; je fis encore là de la bien mauvaise besogne. Après trois jours de marche, si épuisé que je n’avais plus d’appétit, j’arrivai chez la malade qui reçut tous les sacrements et mourut après. C’est une famille de prédestinés ; le mari de cette femme était un des meilleurs chrétiens que j’aie vus en Chine ; toute la famille bien réglée, il faisait jusqu’à trois jours de chemin pour venir voir le prêtre, entendre la messe, recevoir les sacrements. Tous ses enfants m’ont donné bien de la consolation ; il est mort en paix après nous avoir bien édifiés ; il s’appelait Jân. Je donnai à cet endroit pour patron la couronne de N.-S ., demandant, par une oraison qu’ils récitent tous les jours trois fois après l’Angelus, de porter en ce monde la couronne d’épines avec N.-S., afin de porter au ciel la couronne de gloire. Nous avons fait une couronne d’épines que nous avons exposée dans la salle ; je l’ai bénite. En Chine, il y a des épines dont la pointe est plus longue qu’un doigt. Si celles de la Palestine leur ressemblent, ç’a été un cruel supplice pour N.-S. d’en être couronné et d’en avoir le crâne percé. Quelque temps après les païens qui les ont beaucoup persécutés, ont pris cette couronne ; mais celui qui avait fait le sacrilège fut puni ; il mourut quelques mois après.

À cette occasion, je me rappelle un trait plus frappant qui est arrivé sur les montagnes du Poûen. Dans une nouvelle chrétienté, les fidèles avaient fait une grosse croix qu’ils avaient exposée dans leur maison ; les païens croyaient que s’ils la prenaient, les chrétiens la rachèteraient ; ils l’ont enlevée, l’ont enchaînée dans une auberge, et peu de temps après, celui qui avait fait le crime enfla prodigieusement et mourut ; cela est certain. Dans une 2e ou 3e visite de l’endroit dont je parlais, je courus grand risque. Apparemment que les païens nous ayant vus passer, en avertirent des satellites qui vinrent aussitôt inquiéter et vexer les chrétiens et pour nous chercher ; par bonheur que j’étais sorti dans un jardin, un enfant vint m’avertir de ne pas rentrer ; combien de fois ne me suis-je pas vu dans de pareilles rencontres.

Ce bon chrétien convertit une femme devenue sourde dans le voisinage. Elle a persévéré dans les sentiments d’une foi vive et ardente, malgré tous les obstacles qu’elle a eu à souffrir de ses parents tous païens ; ensuite cette famille, se voyant isolée et éloignée des chrétiens, pour mieux servir Dieu, abandonna son terrain, se retira dans les montagnes où les chrétiens étaient plus fervents, cultivaient la terre, souffraient volontiers les incommodités du travail et du froid, de la pauvreté, pour satisfaire leur piété en demeurant dans un endroit où le missionnaire allait souvent.

De là, en retournant vers l’occident, nous vînmes chez la mère de mon disciple Sên, qui était une sainte veuve si pieuse qu’elle ne pouvait s’empêcher de verser des larmes. Les chagrins qu’elle avait eus de la perte de son mari, mort pour la religion, s’étaient tournés en joie et en consolation. Je trouvai dans cet endroit du fruit à faire. Je vis aussi, en passant, la femme d’un exilé à perpétuité, pour la religion.

 

Exilés pour la religion.

 

Table de la Grande Relation

 

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